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L’eau, «source de mort» au Cameroun


Par Robert Demanou Rédigé le 25/03/2010 (dernière modification le 27/03/2010)

Pendant que la communauté internationale célèbre avec faste la 18e journée internationale de l’eau considérée comme source de vie, les populations camerounaises, continuent d’attribuer plus de 90% de leurs cas de maladies à l’eau.


Le Cameroun : un pays qui possède le deuxième potentiel hydraulique du continent, après la République démocratique du Congo (photo wikipedia common, Ophelio13)
Le Cameroun : un pays qui possède le deuxième potentiel hydraulique du continent, après la République démocratique du Congo (photo wikipedia common, Ophelio13)
De l’eau propre pour un monde sain. Tel est le thème retenu pour la 18e journée de l’eau. Thème assez évocateur et paradoxal dans un pays comme le Cameroun où les populations ont difficilement accès à l’eau potable. Le Cameroun compte actuellement près de 280 000 abonnés au réseau d’eau potable pour plus de 17 millions d’habitants. La situation des grandes villes est catastrophique : à Douala, comme dans la capitale politique Yaoundé, trois quarts de la population n'a pas accès individuellement à l'eau potable et moins de 40% des ménages sont raccordés au réseau Camwater, selon le dernier rapport (2007) de l'Institut national de la statistique camerounais. Dans l’Afrique à miniature, la situation concernant l’accès à l’eau est devenue extrêmement problématique. Les grandes villes sont les premières à en payer le prix. Ainsi, à Yaoundé et Douala, les deux plus grandes agglomérations du pays, le robinet ne fournit de l’eau que vers 2h du matin et ce pour un temps incertain.

L’eau étant la vie, des solutions palliatives ont été trouvées par les populations. Les plus démunies ont opté pour des filtres artisanaux tenus à partir de coton et des bouteilles, plusieurs variétés de filtres aux conditions hygiéniques le souvent douteuses sont commercialisées sur le marché, proportionnellement aux revenus de chacun. Si les uns ont trouvé des solutions à partir des filtres, les plus nantis ont recours aux eaux minérales commercialisées dans de grandes surfaces et magasins. Toujours est-il que la grande majorité de la population camerounaise accède toujours difficilement à l’eau potable.

Approchés sur la question, les responsables du ministère de l’Energie et de l’Eau dénoncent la vétusté des équipements de production d’eau potable et la croissance démographique exponentielle pour justifier la pénurie d’eau potable. Ce qui est incompréhensible dans un pays qui possède le deuxième potentiel hydraulique du continent, après la République démocratique du Congo. Avec le programme d’investissements annoncé à grand renfort de publicité, très peu osent espérer que le taux de desserte pourra être porté à plus de 50% dans plusieurs coins et recoins du triangle national.

En attendant, des camions militaires, des rigoles, des puits, et des marigots constituent la seule alternative aux populations impuissantes. Cette situation présente une menace directe pour la santé des populations du Cameroun en raison des nombreuses maladies hydriques observées (typhoïde, onchocercose, diarrhée, dysenterie, etc.). Selon une étude réalisée par l’association Water For All en 2008, plus 85% de ménages au Cameroun, n’ont pas accès à l’eau potable. Cette situation est responsable de 75% de cas de diarrhées, 70% de cas d’onchocercoses et de 68% de cas de typhoïdes. L’OMS (Organisation Mondiale de la Santé) estime que 3,5 milliards de personnes dans le monde sont victimes de l’eau, «source de mort», au Cameroun. La majorité de ces victimes sont issues des pays en développement où l’importance de la population privée d’accès à l’eau potable n’a cessé de croître. On se rend compte en effet que l’objectif des années 80 qui était de parvenir à l’assainissement pour tous d’ici l’an 2000 n’a pas été atteint. De même, l’objectif du millénaire d’accès de plus 50% de la population mondiale aux services sociaux de base en 2015 est loin d’être atteint.

Source de la mort…

Au Cameroun et selon les spécialistes de la santé, une dizaine de maladies sont directement liées à l’eau et les maladies diarrhéiques font de graves victimes. Et un enfant attrape souvent la diarrhée en avalant les microbes qui se trouvent dans les selles. Ces microbes peuvent se transmettre par la suite de plusieurs manières: l’eau ou les aliments, les mains, la vaisselle, les couverts. Par des mouches, partout présentes, ou la saleté retenue sous des ongles mal entretenus. Or, la diarrhée entraîne une perte énorme de liquide, une déshydratation qui conduit souvent à la mort, lorsqu’il n’y a pas de prise en charge. La première attitude recommandée par l’OMS est le respect des règles d’hygiène élémentaires: se laver les mains avec du savon après chaque passage aux toilettes. Ce geste devra être répété plusieurs fois au cours de la préparation des repas ou quand on passe d’un aliment à l’autre. Malheureusement, l’eau utilisée par les populations est encore loin d’être «inodore, incolore et sans saveur» comme recommandée dans tous les livres d’hygiène.

D’après l’UNICEF (Fonds des Nations Unies pour l’Enfance), le simple fait de se laver les mains à l’eau et au savon pourrait, six fois sur sept, éviter les cas de dysenterie transmis dans le milieu familial. Malheureusement, l’on n’a pas toujours la quantité d’eau nécessaire à disposition pour accomplir ce geste. Alors on fait des économies d’eau et les conseils sont négligés. D’après l’UNICEF toujours, si l’on améliore l’approvisionnement en eau, l’assainissement (la présence des latrines et toilettes propres) et le respect des règles d’hygiène, on réduit de 30% le nombre de cas de diarrhée. On réduit de 65% celui des morts liées à cette maladie. Ces attitudes entraînent aussi la diminution des autres maladies liées à la présence d’eau, comme le paludisme ou la maladie du sommeil.

«Nous buvons 90% de nos maladies»

Louis Pasteur disait que «nous buvons 90% de nos maladies». Ce n’était pas pour stigmatiser uniquement l’eau insalubre. C’était pour attirer l’attention sur les autres maladies non transmissibles, imputables à nos styles de vie (diabète, cancer, sida…). La nourriture inadaptée, le manque d’activité sportive sont tout aussi nocifs. Cela n’empêche pas de prendre en compte le rôle essentiel de l’eau.

Les Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) avaient fixé en leur septième point, de réduire de moitié d’ici à 2015, le pourcentage de la population qui n’a pas accès de façon durable à un approvisionnement en eau de boisson salubre et à des services d'assainissement de base. Or la rareté de l’eau empêchera de l’atteindre, menacée par la démographie galopante. Il apparaît donc important de mieux gérer la ressource quand elle est disponible. Ne pas la stocker afin d’éviter les risque de contamination et de créer des zones de reproduction des moustiques, et autres insectes qui transmettent les maladies comme le paludisme ou la maladie du sommeil. Il revient donc à chacun d’apporter sa contribution en apprenant à conserver et préserver la ressource au quotidien.
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