Edito : Ecoutez un regard décalé


Par Rédigé le 16/02/2011 (dernière modification le 16/02/2011)

L'actualité des révolutions tunisienne et égyptienne, sans parler de celle des pays qui aimeraient bien en faire autant – la liste s'allonge d'ailleurs rapidement, l'Algérie, le Yémen, la Jordanie, etc... - semble involontairement occulter celles des régions ou pays, où les systèmes politiques autoritaires bien que souvent confrontés à des révoltes, n'ont pas encore vu leur pouvoir vraiment remis en question. Que l'on ne s'impatiente pas, cela viendra en son temps.


C'est ainsi que le bonheur des uns ne fait pas forcément le malheur des autres, mais toutefois est bien pratique pour certains. Toutes les caméras et micros du monde sont tournés en ce moment vers le Maghreb et le Machrek, permettant à d'autres régimes autoritaires - je pense particulièrement à ceux d'Asie centrale - de continuer leurs petites affaires sans problèmes. Qu'on se rassure, même avant les révolutions qui bouleversent le monde arabe aujourd'hui, on ne s'y intéressait pas. Enfin, quand je dis nous, je parle évidemment des médias, parce que d'autres en revanche s'y intéressent de très près. Toutefois, je ne suis pas complètement honnête car la presse a quand même relevé la visite qu'a effectué le président de l'Ouzbékistan, Islam Karimov invité, il y a peu, par le président de la Commission européenne José Manuel Barroso à Bruxelles, se justifiant par le besoin d'entretenir des relations avec ce pays pour des raisons économico-énergétique.
Penchons-nous aujourd'hui pour l'occasion sur le cas du Kazakhstan. Les politiciens et les entreprises français ne pouvant plus pour l'heure commercer avec les autocrates arabes s'intéressent de plus en plus à ceux d'Asie centrale. Mon attention a été retenue à la lecture d'un excellent article de Guillaume Dasquié sur la question et m'a rappelé l'information sur l'Ouzbékistan. Rappelons qu'en 1991, la disparition de l'Union soviétique a entraîné l'indépendance de cinq républiques d'Asie centrale : le Kazakhstan, le Kirghizstan, l'Ouzbékistan, le Turkménistan et le Tadjikistan qui semble être le moins pire de tous. Toutes à des degrés divers sont des pouvoirs forts, c'est un euphémisme, où l'opposition politique, la presse et les droits de l'homme représentent l'ennemi. Parmi toutes ces anciennes républiques soviétiques, le Kazakhstan est la plus riche – uranium et pétrole principalement. Alors que l'Union européenne et la France viennent de se voir reprocher leurs activités politico-économico financières avec les régimes autoritaires arabes et que le moins que l'on puisse dire est que leur défense fut des plus minables, il semble que la leçon n'ait pas été comprise. On ne peut plus travailler avec le Maghreb, qu'à cela ne tienne, tournons nous vers l'Asie centrale ! Derrière le président Sarkozy, c'est Thierry Mariani, l'actuel secrétaire d'État aux Transports, - je ne saisirai pas l'occasion de vous parler des problèmes d'éthique et de mélange des genres bien que je suis terriblement tenté, mais ce sera pour la prochaine fois, qui officie. Mais revenons à Mariani qui est le VRP officiel de la France au Kazakhstan, pays où d'après Amnesty International, les brutalités policières et la torture seraient monnaie courant. Mais cela n'empêche personne de dormir. Et puis n'est-ce pas, si ce n'est pas nous, ce sera d'autres, alors autant en profiter. Combien de temps encore faudra-t-il entendre cette litanie déjà servie dans le cadre par exemple, des relations économiques avec la Chine ? Et il ne s'agit pas ici de défendre un discours droitdel'hommiste, utilisé aujourd'hui à tout va. Non, il s'agit juste de se poser la question, à savoir un pays comme la France ou plus globalement l'Union européenne ont-elles vraiment raison de croire que l'économie doit primer sur le respect des individus ? Le discours sur la perte des valeurs en Occident, est une autre de ces récurrentes déclarations me mettant elle aussi mal à l'aise. Pourtant, à valoir à tout prix commercer avec ce type d'individus, il est certain que nous y perdons notre âme. Nous n'agissons même pas indirectement pour le bien des populations, puisque l'argent est détourné par les autocrates en question, contredisant l'argument que l'on pourrait nous avancer à ce sujet. A trop les fréquenter, nous allons finir par leur ressembler, ou du moins nos dirigeants qui eux aussi, donnent l'impression de confondre certains intérêts. Qu'ils se méfient alors des réactions populaires, elle n'éclatent pas toujours que chez les autres.





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