Espagne: Le procès du juge Baltasar Garzón

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Par J.N.B.L. Rédigé le 01/02/2012 (dernière modification le 01/02/2012)

"Les poursuites pénales engagées par la Cour suprême espagnole contre un magistrat instructeur courageux constituent une menace envers les droits humains et l'indépendance de la justice", a déclaré Amnesty International vendredi 20 janvier.


Le juge Baltasar Garzón, 56 ans, devait comparaître à Madrid ce 24 janvier. Il est accusé d'avoir outrepassé ses pouvoirs en ouvrant une enquête sur les crimes au regard du droit international commis au cours de la guerre civile espagnole (1936-1939) puis pendant les décennies de dictature du général Francisco Franco.
Le juge est réputé pour avoir mené des enquêtes sur de hautes personnalités, y compris au sommet de l'État, soupçonnées d'avoir commis dans d'autres pays des actes de génocide, des crimes contre l'humanité, des crimes de guerre et des faits de torture, notamment l'ancien dirigeant militaire chilien Augusto Pinochet.

"Connaissant les succès remportés dans de nombreux pays par le juge Baltasar Garzón dans des procédures concernant des crimes relevant du droit international, il semble impensable que les autorités judiciaires espagnoles veuillent l'empêcher d'enquêter sur des crimes de même nature en Espagne. Il faut abandonner les poursuites engagées contre lui, car elles représentent un coup porté aux droits humains et aux efforts pour obtenir justice", a souligné Hugo Relva, conseiller juridique d'Amnesty International, qui est à Madrid pour suivre le procès.

Le juge Garzón fait l'objet de deux autres procédures pénales, l'une étant liée à des écoutes illégales de conversations entre des accusés et leurs avocats, tandis que dans une autre affaire il est soupçonné d'avoir perçu des pots-de-vin. Il affirme n'avoir commis aucune faute. Amnesty International ne prend pas position sur le fond de ces procédures. S'il est condamné à l'issue du procès qui s'ouvre le 24 janvier, il sera sans doute exclu de la magistrature pour une durée qui pourrait atteindre 20 ans, ce qui mettrait de facto fin à sa carrière judiciaire et enterrerait son enquête sur Franco.

Cette enquête, lancée en 2008, a été la première à examiner les crimes relevant du droit international commis pendant la guerre civile espagnole et les années initiales du régime de Franco. Elle porte sur plus de 114.000 cas de disparition forcée qui ont eu lieu entre juillet 1936 et décembre 1951.
En mai 2010, le Conseil général du pouvoir judiciaire a suspendu Baltasar Garzón après que la Cour suprême l'eut accusé d'avoir délibérément enfreint une loi d'amnistie votée en 1977. Cette loi, selon certaines interprétations, rendrait impossible toute enquête sur les crimes commis avant 1976.

Amnesty International soutient la position de Baltasar Garzón, qui estime que l'Espagne devrait ignorer la loi d'amnistie car celle-ci fait obstacle à l'obligation d'enquêter sur les crimes au regard du droit international et d'en poursuivre les auteurs présumés.
Selon des informations reçues par Amnesty International, plusieurs autres enquêtes récentes sur des crimes commis en Espagne dans le passé ont été entravées dans l'attente de la décision de la Cour suprême sur l'affaire Garzón.

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