L'actualité des droits humains et de leurs violations, en Afrique


Par J.N.B.L. Rédigé le 23/10/2010 (dernière modification le 22/10/2010)

Onze personnes détenues arbitrairement depuis juin 2010 doivent être libérées en République Centrafricaine (RCA).


Amnesty International demande au gouvernement centrafricain de libérer 11 personnes détenues arbitrairement sans avoir été jugées depuis le mois de juin 2010, uniquement en raison de leurs liens établis ou présumés avec un avocat et un homme d'affaires recherchés par les autorités. L’avocat Symphorien Balemby et l’homme d’affaires Jean-Daniel Ndengou ont fui la République Centrafricaine après avoir été accusés publiquement d’être responsables de l’incendie d’un supermarché appartenant à un propriétaire privé survenu dans la nuit du 9 juin 2010 à Bangui, la capitale.

Parmi les 11 détenus figurent Albertine Kalayen Balemby, épouse et secrétaire de Symphorien Balemby, président de l’Association du Barreau de République centrafricaine, et Gabin Ndengou, frère de l’homme d’affaires Jean-Daniel Ndengou.

En outre, Bienvenu Ngaro et Prosper Gbanga sont incarcérés en raison de leur lien avec l’avocat Symphorien Balemby. Quant aux personnes détenues parce qu'elles sont liées à l'homme d'affaires Jean-Daniel Ndengou, il s’agit de Michelle Bengba, Lin Maximin Crozin Cazin, Austin Moudjikem, Michael Boda Makpevode et Mathurin Ngozoua Mamadou. On ignore encore quels liens présumés deux des détenus, Ngere Koundangba et Mathurin Francisco Willibona, entretiendraient avec Symphorien Balemby et Jean-Daniel Ndengou.
Ces 11 détenus auraient été inculpés d’incendie, d’incitation à la haine et d’association de malfaiteurs. Cependant, lorsque les représentants d’Amnesty International ont interrogé le Haut-commissaire aux Droits de l’homme et à la Bonne gouvernance du gouvernement centrafricain quant aux motifs de leur arrestation, il a répondu que si Symphorien Balemby et Jean-Daniel Ndengou voulaient que les membres de leur famille et leurs employés soient relâchés, il leur suffisait de se rendre aux autorités. Cette réponse indique clairement que ces 11 personnes sont incarcérées uniquement en raison de leur lien réel ou présumé avec les deux hommes que recherchent les autorités.

On ne saurait justifier en invoquant le droit national ou international l’arrestation et la détention d’une personne uniquement parce qu’elle est une parente ou une collègue d’une autre personne soupçonnée d’avoir commis une infraction. De telles détentions sont arbitraires et illégales aux termes du droit international relatif aux droits humains. Considérant que ces 11 personnes sont victimes de détentions arbitraires, Amnesty International exhorte les autorités centrafricaines à les libérer immédiatement et sans condition.

Après leur arrestation, qui a eu lieu autour du 10 juin 2010, ces 11 personnes ont été transférées au milieu de la nuit dans une prison militaire à Bossembélé, à quelque 140 kilomètres au nord de Bangui. Amnesty International a appris qu’elles ont depuis lors été transférées dans une prison civile à Bossembélé. Il semble que leurs conditions de détention se soient améliorées, mais leurs proches doivent toujours leur fournir nourriture, linge de lit et médicaments. Au moins l’un des détenus, Prosper Gbanga, souffre d’une maladie chronique et a besoin de soins constants. D’autres sont atteints de pathologies telles que la malaria.

Des représentants d’Amnesty International se sont rendus en République centrafricaine en juillet 2010 et se sont entretenus avec des avocats et des témoins au sujet de l’incendie qui a dévasté le supermarché Rayan. Toutes les personnes interviewées ont déclaré unanimement que les autorités n’avaient procédé à aucune enquête avant d’accuser Symphorien Balemby et Jean-Daniel Ndengou d’être les auteurs de l’incendie et de les menacer avec violence. Les agents des forces de sécurité n’ayant pas pu mettre la main sur les deux hommes, ni chez eux ni à leur bureau, ils ont arrêté les 11 personnes susmentionnées.

Complément d’information
Avant que le supermarché Rayan ne soit réduit en cendres, Symphorien Balemby et Jean-Daniel Ndengou étaient locataires d’un immeuble attenant, baptisé Bangui 2000. La propriété de Bangui 2000 faisait l’objet d’un litige et Symphorien Balemby représentait les intérêts de René Koffi Bodombossou, l’une des parties concernées. Le propriétaire du supermarché Rayan, Ali El Akhras, avait fait main basse sur Bangui 2000 et ordonné à Symphorien Balemby et Jean-Daniel Ndengou de quitter l'immeuble.
Deux jours à peine après qu’ils eurent quitté Bangui 2000, le supermarché Rayan a été la proie des flammes. À la connaissance d’Amnesty International, les membres des forces de sécurité et les gardiens du supermarché n’ont pas vu quelqu’un mettre le feu au bâtiment, ni déclaré savoir que tel était le cas. Diverses sources à Bangui, notamment des membres de l’Association du Barreau de République centrafricaine, ont affirmé que le 10 juin 2010 le président François Bozizé s’était rendu personnellement au parquet de Bangui et avait ordonné l’arrestation immédiate de Symphorien Balemby et Jean-Daniel Ndengou. Selon les mêmes sources, François Bozizé avait parlé de « réduire en pièces » les incendiaires présumés en faisant allusion aux deux hommes. Symphorien Balemby et Jean-Daniel Ndengou ont fui le pays et n’y ont pas encore remis les pieds.






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