Un été musical à Innsbruck

La chronique culturelle de Colette


Par Rédigé le 15/07/2019 (dernière modification le 15/07/2019)

Chaque année depuis 1976, les amateurs de musique ancienne se retrouvent dans la capitale du Tyrol à l’occasion des Innsbrucker Festwochen der Alten Musik. En 2019, le festival se déroulera du 16 juillet au 27 août prochain.


Innsbruck, la capitale du Tyrol accueille chaque année les Innsbrucker Festwochen der Alten Musik (c) DR

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Et comme toujours, concerts et diverses manifestations offrant de bien agréables découvertes, alterneront dans plusieurs lieux les plus notables de l’ancienne cité impériale qui fut au coeur des Alpes, un centre musical important à la Renaissance et à l’époque baroque, salle espagnole du château Ambras, Hofburg, diverses églises de de la ville ou Tiroler Landstheater notamment. L’empereur du Saint empire romain germanique Maximilien Ier est à l’honneur cette année, on célèbre le 500e anniversaire sa mort, le 12 janvier 1519. De nombreuses expositions donnent aux visiteurs l’occasion d’en savoir davantage sur lui et son époque, des concerts permettront de connaître ce que l’on interprétait à la cour.

C’est aussi le 350e anniversaire de la mort le 14 octobre 1669, de l’Italien Pietro Antonio Cesti connu aussi sous le nom de Marc'Antonio Cesti. Ce franciscain, aussi chanteur, avec une belle voix de ténor selon les chroniques, organiste et compositeur, fut à partir de 1652 maître de chapelle de l'archiduc Ferdinand-Charles de Habsbourg à Innsbruck où l’on succombait au charme de l’opéra italien. Et pour leur 43e édition, les Innsbrucker Festwochen der Alten Musik lui rendent hommage en programmant son opéra "La Dori" qui connut en 1657 un grand succès. A Innsbruck, on peut voir la maison qu’occupait Cesti, à l’angle d’une rue, face à la cathédrale Sankt-Jakob.

Le festival de musique ancienne célébrera cette année un autre anniversaire, la 10e édition du Concours International de chant Pietro Antonio Cesti. Il attire depuis sa création de nombreux jeunes chanteurs et chanteuses talentueux venus du monde entier.
Trois opéras sont au programme, trois compositeurs, deux Italiens, l’un a vécu et travaillé à Innsbruck, l’autre est le frère d’un castrat célèbre, ainsi qu’un Allemand qui a fait une partie de sa carrière en Angleterre, deux époques, la moitié du XVIIe siècle et le premier tiers du XVIIIe. "Mérope" de Riccardo Broschi, "Ottone, re di Germania" de Georg Friedrich Händel et "La Dori overo lo schiavo reggio" d’Antonio Cesti.

Tiroler Landstheater et Faculté de théologie à l’heure italienne

"Mérope" était cette reine de Messénie qui n’inspira pas que les compositeurs, puisqu’une tragédie éponyme en cinq actes de Voltaire dramaturge fut représentée à la Comédie-Française le 20 février 1743.
Celle de Riccardo Broschi s’inspire du livret de l’écrivain vénitien Apostolo Zeno et fut créée en 1732 au Teatro Regio de Turin, avec succès. Un an plus tard, Geminiano Giacomelli présentait à Venise sa Merope, là encore sur un livret d’Apostolo Zeno.
Riccardo Broschi, né vers 1698 à Naples et mort à Madrid en 1756, était le frère aîné de Carlo Maria Michelangelo Broschi qui deviendra l’illustre Farinelli. Ce dernier faisait partie de la distribution de Turin dans le rôle d'Epitide qui sera tenu à Innsbruck par le contre-ténor australien David Hansen. Les trois spectacles de danse originels ont été reconstitués grâce à des manuscrits du compositeur turinois Carlo Alessio Rasetti, conservés à la bibliothèque de l’Académie Santa Cecilia à Rome. A Innsbruck, la chorégraphe belge Sigrid T'Hooft qui s’en est inspirée a également mis en scène l'opéra. Alexandro de Marchi qui est depuis 2010 le directeur artistique des Innsbrucker Festwochen der Alten Musik, dirigera l'Orchestre du Festival d'Innsbruck et promet "une fête baroque pour les yeux et les oreilles riche d’airs, marches, choeurs, fanfares et danses magnifiques".

Le 21 octobre prochain à 19h, le Theater an der Wien de Vienne présentera "Mérope" avec la même distribution et en version de concert.

"Ottone re di Germania", opéra en trois actes de Georg Friedrich Haendel, est mis en scène par Anna Magdalena Fitzi sous la direction musicale de Fabrizio Ventura à la tête e l’ensemble La chimera.
C’est le 15e du compositeur né le 23 février 1685 à Halle et mort le 14 avril 1759 à Londres. Et un des premiers qu’il composa pour la Royal Academy of Music de Londres qu’il avait contribué à fonder et qu’il dirigea. Il fut créé au King’s Theatre Haymarket le 10 janvier 1723 en présence du roi George II. Deux cé!èbres cantatrices, Margherita Durastanti et Francesca Cuzzoni, ainsi que le castrat Il Senesino dans le rôle-titre y participaient. Nicola Francesco Haym, son librettiste presque attitré, en écrivit le texte d’après celui de Stefano Benedetto Pallavicino pour l’opéra Teofane d’Antonio Lotti, créé au Hoftheater de Dresde, le 13 septembre 1719 auquel Haendel assistait sans doute. On est à Rome à la fin du Xe siècle sous le règne d’Othon II dit le Roux, empereur du Saint-Empire romain germanique, il épousera après maintes péripéties la princesse byzantine Théophane qui a dû affronter de terribles intrigues.

En 1657, est créé avec grand succès au Hoftheater d’Innsbruck "overo Lo schiavo regio", l’esclave royal, de Pietro Antonio Cesti né à Arezzo le 5 août 1623 et mort à Florence le 14 octobre 1669. Sur un livret de Giovanni Filippo Apolloni, natif lui aussi d’Arezzp et poète à la cour de l'archiduc Ferdinand-Charles. Cet opéra tragi-comique en trois actes est mis en scène par Stefano Vizioli et sous la direction musicale d’Ottavio Dantone à la tête de l’Accademia bizantina. Même si on ne connaît pas la distribution d’origine, on peut supposer que Cesti y participait. L’intrigue de "La Dori" est comme il se doit fort compliquée, travestissements, enlèvement, sans oublier quelques personnages habituels, nourrice haute en couleur, valet comique ou eunuque. Mais après d’innombrables péripéties des rives de l’Euphrate à la cour de Babylone, tout rentre dans l’ordre et finit bien naturellement. "La Dori" fait partie de ces opéras que Cesti composa et présenta à Innsbruck. En novembre 1655, "L’Argia" avait été fort apprécié par la reine Christine de Suède alors de passage à Innsbruck. Plus tard, elle appellera Cesti à Rome. "La Dori" a souvent été reprise par la suite en Italie et encore plusieurs fois au XXe siècle. 

Tiroler Landstheater:
"Mérope" de Riccardo Broschi,les 7, 9 et 11 août
"La Dori overo lo schiavo reggio" d’Antonio Cesti, les 24 et 26 août
Cour intérieure de la Faculté de théologie:
"Ottone, re di Germania" de Georg Friedrich Händel, les 18, 20 et 22 août à 20h





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