A l’Unesco, on apprécie la baguette française.....


Par Rédigé le 12/12/2022 (dernière modification le 12/12/2022)

..... au point de l’avoir inscrite dans les derniers jours de novembre au patrimoine immatériel de l'humanité.


La célèbre baguette de pain française sauvée par l'Unesco ! (c) DR
L'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture honore plus des traditions et un savoir-faire artisanal que le produit lui-même. Adoptée en octobre 2003 et ratifiée par 180 pays, la Convention pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel a pour but de sauvegarder les connaissances et le savoir-faire nécessaires à l'artisanat traditionnel et récompense des "pratiques culturelles transmises de génération en génération, comme les traditions orales, les arts du spectacle, les pratiques sociales, rituels et événements festifs ou encore les connaissances et pratiques concernant la nature et l'univers". Cette liste du patrimoine culturel immatériel de l'humanité compte actuellement près de 700 éléments inscrits, dont presque une centaine nécessitent une sauvegarde urgente.

C’était la première fois le Comité du patrimoine culturel immatériel de l'Unesco se réunissait depuis 2019, les deux sessions annuelles de 2020 et 2021 s’étaient tenues en ligne en raison de la pandémie. Pour sa 17e session, Il était réuni à Rabat et présidé par S. E. Samir Addahre, ambassadeur et délégué permanent du Royaume du Maroc auprès de l’UNESCO. Y participaient des représentants des États parties, des organisations non gouvernementales, des institutions culturelles et d’autres parties prenantes venus du monde entier. Le Comité a examiné 56 demandes d'inscription, dont quatre nécessitant une sauvegarde urgente, comme l'art de la poterie au peuple Cham au Vietnam. Parmi les dossiers les plus remarqués, on notait la baguette de pain française, le chant populaire raï algérien, les fêtes foraines de France et de Belgique, la culture du "tchaï/thé" d’Azerbaïdjan et de Turquie, les techniques traditionnelles de transformation du thé en Chine, le rubab, luth d'Asie centrale d’Iran-Tadjikistan-Afghanistan, la slivovitz, l'alcool de prune de Serbie, le rhum léger de Cuba. "C'est du patrimoine vivant. La grande différence entre cette liste du patrimoine immatériel et la liste du patrimoine (matériel) mondial, c'est qu'ici ce sont des communautés qui sont représentées et qui sont les protagonistes de cette sauvegarde", a rappelé Ernesto Ottone, sous-directeur général pour la culture de l'Unesco.

Ce choix de la baguette française préférée aux toits de zinc parisiens et à une fête vinicole jurassienne, a été salué par Dominique Anract, président de la Confédération nationale de la boulangerie-pâtisserie française "C'est une reconnaissance pour la communauté des artisans boulangers-pâtissiers. (...) La baguette, c'est de la farine, de l'eau, du sel, de la levure et le savoir-faire de l'artisan". On constate que chaque jour, 12 millions de consommateurs français achètent une baguette et qu’on fait chaque année plus de six milliards de baguettes. Ce succès est relativement récent, elle est apparue au début du XXe siècle, héritière des pains longs du XVIIe siècle.

Rima Abdul Malak, ministre de la Culture, s'est félicitée de cette décision de l’Unesco qui "consacre la dimension patrimoniale des savoir-faire artisanaux de la baguette et reconnaît qu’aller chercher son pain est aussi un acte culturel, un moment de partage et de lien social. La baguette est reconnue dans le monde entier comme un symbole de la gastronomie française. Sous ses différentes formes, traditionnelle ou réinventée par nos artisans, la baguette rythme le quotidien des Français – matin, midi et soir – depuis plusieurs siècles et s’est exportée dans de nombreux pays".

Sa collègue Olivia Grégoire, ministre déléguée chargée des Petites et moyennes entreprises, du commerce, de l’artisanat et du tourisme, s’est réjouie de cette inscription "Cette décision contribue au rayonnement du savoir-vivre à la française, des traditions de partage et de convivialité, et du savoir-faire de nos artisans boulangers. C’est une reconnaissance de la culture de la baguette qu’il nous revient de préserver, de protéger, pour assurer la transmission de ce patrimoine".

Cette reconnaissance est importante quand on connaît les menaces qui pèsent sur la baguette, surtout l'industrialisation et la baisse du nombre de boulangeries, surtout dans la ruralité. En 1970, on comptait environ 55.000 boulangeries artisanales soit une boulangerie pour 790 habitants; on en dénombre actuellement 35.000; soit une pour 2 000 habitants. On note la disparition de 400 boulangeries par an en moyenne depuis une cinquantaine d'années.

La liste s’est enrichie aussi des Fêtes de l'Ours dans les Pyrénées-Orientales, célébrées à Arles-sur-Tech, Prats-de-Mollo-la-Preste et Saint-Laurent-de-Cerdans. La Festa de l’Os ou Chasse à l’ours ou encore Jour de l’ours, est une tradition carnavalesque catalane et pyrénéenne, des hommes déguisés en ours se lancent à l’assaut du village, symbolisant ainsi la fin de l’hibernation de l’ours et le début du printemps. Son origine remonterait au XVe siècle. On note aussi la danse des masques coréens ou "Talchum" qui combine la danse avec le récit qui l'accompagne, elle a les caractéristiques des arts du spectacle et du théâtre.

Une cinquantaine d’éléments ont été retenus cette année pour la liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité, y compris ceux nécessitant une sauvegarde urgente. Citons parmi ces récentes entrées les festivités associées au voyage de la Sainte Famille en Égypte; les traditions d’élevage des chevaux Lipizzan pour l’Autriche, la Bosnie-Herzégovine, la Croatie, la Hongrie, l'Italie, la Roumanie, la Slovaquie et la Slovénie; le savoir-faire des maîtres du rhum léger de Cuba; la tradition de l’ensemble à cordes hongrois. Sans oublier la harissa, condiment national en Tunisie que le dossier de candidature du pays présentait ainsi "Utilisée comme condiment, ingrédient, ou même un plat à part entière, la harissa est bien connue sur tout le territoire tunisien, où elle est consommée et produite en particulier dans les régions qui cultivent le piment" . Ni le raï algérien, c’est donc le moment d’en terminer avec le débat sur la paternité de ce genre musical et surtout de le réhabiliter.





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