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La chronique culturelle de Colette: La diva qui chantait faux


Par Rédigé le 28/07/2016 (dernière modification le 27/07/2016)

Jusqu'à tout récemment, Florence Foster Jenkins n'était connue que de quelques curieux, ne figurait que dans un dictionnaire des interprètes, ou bien on l'associait à tort paraît-il, à Bianca Castafiore d'Hergé dont elle aurait été l'inspiratrice. Depuis quelques mois, elle est apparue en pleine lumière grâce à deux films.


chronique_culturelle_280716.mp3 Chronique culturelle 280716.mp3  (1.78 Mo)

Tout d'abord celui de Xavier Giannoli "Marguerite", sorti en septembre 2015 et celui de Stephen Frears "Florence Foster Jenkins" qui est sur les écrans depuis peu. Le premier s'inspire librement de la vie de la cantatrice, transposée à Paris dans les années '20 et interprétée par Catherine Frot.

Quant au second, il évoque, et avec quel brio, le New York des années '40 quand se produit l'originale soprano qui chantait faux et ne respectait aucun rythme et dont on a comparé la voix au bruit d'un déraillement de chemin de fer. Le rôle en a été confié à Meryl Streep, merveilleuse.

Immensément riche à la mort de son père en 1909, Narcissa Florence Foster née en Pennsylvanie le 19 juillet 1868, peut alors s'adonner au chant qui est la passion de sa vie. Jusque là elle s'était consacrée à l'enseignement du piano dont on dit qu'elle était une brillante interprète mais un accident à un bras mettra fin à sa carrière. Elle peut alors étudier le chant et s'impliquer dans la vie musicale de son pays, notamment par la création de clubs Verdi. Elle avait été empêchée de donner libre cours à sa vocation par son père et pour se venger, elle s'était enfuie avec le docteur Frank Thornton Jenkins qui l'avait épousée et lui avait transmis sa syphilis, ils divorcèrent en 1902. Elle vit à l'hôtel Seymour de New York avec son nouveau compagnon Saint-Clair Bayfield, un acteur plus ou moins raté, interprété superbement par Hugh Grant. Il la protège et lui laisse croire qu'elle a du talent.

Dans son élégant appartement elle reçoit l'enseignement de maîtres prestigieux et se fait accompagner par des pianistes talentueux dont le Mexicain Cosmé McMoon, rôle brillamment tenu par Simon Helberg. Parce qu'elle est très généreuse aucun d'entre eux n'ose lui dire qu'elle chante faux… Il en est de même pour le public trié sur le volet qu'elle accueille au Ritz-Carlton et qui applaudit chaleureusement les airs d'opéra et les compositions de ses pianistes qu'elle massacre.

Elle apparaît également dans des tableaux vivants aux situations les plus extravagantes. Elle se produit toujours dans des tenues plus bizarres les unes que les autres, dont elle change plusieurs fois au cours de la même soirée. Elle effectua plusieurs enregistrements qui sont toujours fort écoutés. Mais le couronnement de sa carrière fut certainement le concert public qu'elle organisa à 76 ans, le 25 octobre 1944 à 20h30, au Carnegie Hall, et où elle s'est surpassée… On refusa au moins 2.000 personnes. La salle était comble, les applaudissements couvraient les rires, on dut même évacuer des spectateurs pris d'un fou rire inextinguible alors qu'elle continuait imperturbablement son récital de fausses notes!

Saint-Clair Bayfield eut beau lui cacher les critiques sévères que publièrent certains journaux, elle trouva cependant celle du New York Post où elle découvrit ce qui se disait de son interprétation. Florence Foster Jenkins fut foudroyée par une crise cardiaque et elle mourut quelques jours plus tard. le 26 novembre 1944. Elle persistait à croire que les critiques émanaient de personnes jalouses et eut quand même assez de bon sens pour déclarer "Les gens pourront toujours dire que je ne sais pas chanter, mais personne ne pourra jamais dire que je n’ai pas chanté"…

Celle qui a été considérée comme la plus mauvaise chanteuse de tous les temps n'a cessé de fasciner et d'inspirer écrivains ou cinéastes. Outre les deux films récents cités ci-dessus, il y eut en 1941 "Citizen Kane" d'Orson Welles où le personnage de Susan Alexander Kane emprunte quelques traits à Florence. Ainsi que le documentaire "Florence Jenkins a world of her own" de Donald Collup en 2007. Sans compter "Souvenir", pièce de Stephen Temperley créée en 2005 à Broadway et adaptée en français en 2012 sous le titre "Colorature, Mrs Jenkins et son pianiste" par Stéphane Laporte pour un théâtre parisien. Et la biographie "Florence Foster Jenkins The Life of the World's Worst Opera Singer" de Darryl W. Bull.

On ne saura jamais si Florence Foster jenkins était consciente des failles de sa voix et avait voulu mystifier un public crédule et trop heureux d'être admis dans les cercles mondains où elle se produisait. Ou bien, si une altération quelconque de son audition, naturelle ou due à la syphilis dont elle était atteinte, l'empêchait de se rendre compte de ce qu'elle donnait à entendre. Ou tout simplement si elle avait quelque peu perdu la raison, naturellement ou des suites de ladite maladie… Avec le film de Frears, comme auparavant avec celui de Giannoli et sans doute lors des récitals de la cantatrice, l'auditeur est assez mal à l'aise. Il est gêné que quelqu'un puisse ainsi devant lui se donner en spectacle sans se rendre compte du ridicule et il est presque enclin à plaindre cette malheureuse qui semble ne se rendre compte de rien. Il n'a en tout cas pas vraiment envie de rire!










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