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L'attachement au coeur du développement humain


Par Elise Venet Rédigé le 22/09/2019 (dernière modification le 24/08/2019)

La théorie de l'attachement place les relations humaines au centre des besoins de l'enfant, comme un besoin primordial à son équilibre psychique. Ses premiers attachements avec ses figures de référence orienteront ses relations sociales d'adulte. Mais quelle est la place des émotions dans la recherche scientifique actuelle ?


Le père fondateur, John Bowlby

L'attachement de l'enfant à une figure tutélaire correspond à un processus évolutif de l'espèce humaine, nécessaire à son développement, de même que chez les primates et d'autres espèces. / (c) Photo d'Annie Spratt sur Unsplash
L'attachement de l'enfant à une figure tutélaire correspond à un processus évolutif de l'espèce humaine, nécessaire à son développement, de même que chez les primates et d'autres espèces. / (c) Photo d'Annie Spratt sur Unsplash
Au début du XXe siècle, plusieurs psychanalystes dont Anna Freud et Donald Winnicott soulignaient dans leur travaux l'impact des carences affectives sur la construction identitaire des individus. Le psychiatre et psychanalyste John Bowlby établit en 1969 la théorie de l'attachement qui met en lumière l'importance des rapports de l'enfant à sa figure d'attachement ("caregiver" en anglais, soit celle ou celui qui prodigue les soins) dans les premières années de son existence.

Hérité de sa propre expérience, l'intérêt que Bowlby porte à cette thématique est significatif. Élevé par une nourrice jusqu'à ses 4 ans dans une riche famille britannique, la séparation d'avec cette femme laissera une profonde empreinte chez le petit garçon qu'il était alors.

A partir des enseignements de Mélanie Klein, Bowlby se distancie assez vite de la psychanalyse de son temps, qu'il estime désincarnée. S'appuyant sur les travaux d'éthologie (étude du comportement des espèces animales) de Harlow sur les macaques, et de Lorenz sur les oies cendrées, il s'attache à démontrer que les émotions constituent un objet d'étude à part entière, au même titre que la raison et la capacité de réflexion (héritées du cogito de Descartes.) L'OMS nomme ainsi John Bowlby responsable d'une étude sur les besoins d'enfants orphelins en Europe et aux Etats-unis, à l'issue de la Seconde Guerre mondiale.
 

La théorie in situ

Le modèle d'attachement développé par chacun d'entre nous au cours de nos premières années déterminera nos relations adultes / (c) Photo de Megan McFadden sur Unsplash
Le modèle d'attachement développé par chacun d'entre nous au cours de nos premières années déterminera nos relations adultes / (c) Photo de Megan McFadden sur Unsplash
La thèse soutenue par John Bowlby avance l'idée que le nourrisson dispose de réponses innées destinées à nouer une relation avec sa figure d'attachement. Parmi ces réponses, pleurer, sourire, s'agripper sont quelques exemples de gestes répétés par le bébé ("caretaker", receveur de soins) dans le but de créer la relation à son "caregiver", soit la personne lui prodiguant des soins.

On a souvent reproché à la théorie de Bowlby de ne se focaliser que sur la relation précoce mère-enfant. Or, les avancées des sciences sociales et de la médecine mettent en évidence le rôle du père, des sœurs et frères, ou de professionnels qui peuvent également endosser le rôle de caretakers.

Chaque être humain construit son propre modèle d'attachement, inscrit dans son inconscient. Celui-ci déterminera en partie ses interactions avec ses parents, amis ou collègues une fois adulte. La proximité physique et la disponibilité émotionnelle de l'adulte référent de l'enfant modèlent différents types d'attachement. A la suite de Bolwby, Mary Ainsworth mène plusieurs expériences de courtes séparations du petit enfant et de sa mère (expérience connue sous le nom de "la situation étrange"). Elle établit trois catégories :

- l’attachement sécure, situation dans laquelle la figure de référence fournit des réponses adéquates aux besoins de l’enfant qui n'a pas d'effort à fournir pour être entendu et aimé ; ce schéma permet à l'adulte d'établir des relations stables et de gérer pacifiquement les conflits.

- l’attachement insécure évitant, dans le cas d'interactions réduites avec le parent, développant l'autonomie et le détachement de l'enfant, qui inhibe ses émotions et semble aller facilement à la rencontre de son environnement et d'inconnus. Amené à minimiser ses affects dans son enfance, l’adulte évitant maintient ses proches à distance et invoque un fort besoin d'autonomie.

- l’attachement insécure ambivalent/anxieux, dans le cas de réactions parentales parfois aussi opposées que l’hypervigilance anxieuse (surprotection), ou le désintérêt ou la négligence. Celles-ci donnent lieu à un état d'agitation du bébé en absence du parent, qui pourra plus tard manipuler son entourage.
 

Et les neurosciences dans tout ça ?

"Les enfants connaissent de véritables tempêtes émotionnelles (...) qui ne sont pas des caprices." Catherine Gueguen / (c) Photo sur Unsplash
"Les enfants connaissent de véritables tempêtes émotionnelles (...) qui ne sont pas des caprices." Catherine Gueguen / (c) Photo sur Unsplash
theorie_de_l__attachement.mp3 théorie de l'attachement.mp3  (289.67 Ko)

Aujourd'hui,en France, la théorie de l’attachement connaît un regain d’intérêt de la part de chercheurs et de professionnels de tous secteurs : neurosciences, protection de l’enfance, soins aux personnes âgées, psychologie de la personnalité, psychologie sociale…

Les émotions ont longtemps constitué le parent pauvre des neurosciences cognitives. Leur caractère subjectif les a tenues à l'écart des expérimentations de laboratoire. Antonio Damasio et d'autres chercheurs ont néanmoins ouvert la voie des recherches sur le cerveau émotionnel. L'étude des processus neuronaux induits par les émotions humaines progresse petit à petit grâce aux progrès réalisés en matière d'imagerie cérébrale d'une part, et en matière d'expérimentation des sciences cognitives d'autre part.

Cela facilite, par conséquent, l'étude des mécanismes d'attachement et leur impact sur notre cerveau. Les données neurophysiologiques obtenues soulignent sans équivoque la prégnance des soins maternels sur l'équilibre de l'enfant, en particulier au cours de ses deux premières années. Citée dans l'émission de France Inter dédiée à la théorie de l'attachement, la pédiatre Catherine Gueguen rappelle la force des émotions chez l'enfant et la façon dont elles le façonnent :

"Le cerveau de l'enfant a besoin (...) d'être compris dans sa particularité d'enfant c'est à dire dans son immaturité émotionnelle, Beaucoup de parents veulent que leur enfant de 2-3 ans se comporte comme un adulte alors que l'enfant vit de véritables tempêtes émotionnelles du fait de l’immaturité de son cerveau (du cortex préfrontal): il connait d'immenses paniques, d'immenses colères, d'immenses chagrins qui ne sont pas des caprices. Les adultes en rassurant l'enfant vont faire maturer son cerveau"









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