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ALGER : MÉTRO C’EST TROP !


Par Ali Belhouchet Rédigé le 10/06/2011 (dernière modification le 13/06/2011)

"Le métro d'Alger, en construction depuis trente ans, pourrait enfin être mis en service d'ici à la fin de l'année ou au plus tard janvier", a déclaré Pierre Mongin, président de la RATP, sur la chaîne d'informations France 24. Ce même responsable a ajouté : "Il y a eu un certain nombre d'événements politiques tragiques (...) qui ont retardé profondément et durablement ce projet (…), aujourd’hui les choses sont en très bonne voie".


La station La Grande Poste du métro du centre-ville d'Alger. Photo (c) Ardastos
La station La Grande Poste du métro du centre-ville d'Alger. Photo (c) Ardastos
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Officiellement, ce projet traînaillant devrait être réceptionné à la fin d’octobre prochain, selon les prévisions du ministère des Transports, M, Amar Tou ,communiquées dimanche dernier à l’occasion de l’inauguration d’une tranche du tramway d’Alger, l’autre projet lancé depuis des années dans le but de moderniser et désembouteiller la métropole d’Alger. Cette contradiction n’est pas la première dans son genre. En effet, depuis le lancement du projet il y a à peut près trois décennies, la polémique n’a jamais cessé, alimentée par les multiples rebondissements, déconvenues, et les perpétuels péripéties qui ont donné à ce projet une profonde dimension politique depuis le lancement du chantier.

LE BOUT DU TUNNEL
L’ancien Premier ministre français Jean-Pierre Raffarin a exprimé la volonté du côté français de prendre en charge ce dossier. Cité par l’AFP, M. Raffarin a clairement signifié la disponibilité de la France de déployer tous les efforts pour l’ouverture du métro avant fin 2011. Il a déclaré "tout faire" pour que le métro d’Alger, qui lui tient "à cœur", soit ouvert avant fin 2011. "Ce dossier me tient vraiment à cœur, et nous faisons tout pour que le métro soit ouvert avant la fin de l’année" a déclaré M. Raffarin. Cette déclaration "sympathique" vient soulager et les politiques algériens et la population algéroise, chacun dans son contexte, d’abords le gouvernement algérien a à cœur que la chantier du métro s’achève, car comme déjà avancé, le projet a développé une dimension politique qui porte préjudice à "l’image de marque" du gouvernement en place et nuit à son marketing politique essentiel à sa pérennité, et qui dans un contexte de tensions sociales doublé d’un climat émeutier craint d’être dé-crédibilisé d’avantage aux yeux de sa population. Du coté des citoyens rencontrés dans les rues algéroises c’est "on veut simplement arriver au boulot à l’heure", "ça a trop tardé" et la fameuse "trop c’est trop" dont s’inspire le titre de cet article et dont le but est de raconter l’histoire du métro d’Alger, et de ses protagonistes comme les acteurs économiques, politiques et des milliers de figurants gantés et coiffés de casques antichocs, tous évoluant dans le décor du sous-sol algérois…

LA MISE SUR LES RAILS IMAGINEE DEPUIS… 1920 (1)

Dès la fin des années 1920, une étude sur la réorganisation des transports publics algérois menée par l'exploitant du réseau parisien préconisait, compte tenu de la topographie de la ville, la création d'une ligne de métro mais le coût élevé de ce projet ne permis pas sa concrétisation. Après plusieurs projets de mise en souterrain partiel du réseau de tramways de la ville qui n'aboutirent pas plus, une nouvelle étude de la RATP remise en 1959, préconise à nouveau la création d'une ligne du même type que le métro sur pneus exploité à Paris mais le projet sera à son tour, abandonné à cause de la guerre de la libération nationale menée par le FLN contre la France coloniale.
Après l’indépendance, l’idée de doter Alger d’un métro sous-terrain a continué de séduire les décideurs algériens, en quête de symboles de la puissance et la modernité de l’Algérie des années 1970, une Algérie socialiste toujours galvanisée par son histoire anticolonialiste ; mais il fallait attendre l’année 1982 pour le lancement officiel des travaux, les études techniques achevées en 1985, une entreprise allemande et une japonaise sont retenues pour la réalisation, mais la chute du prix du baril de pétrole réduisit considérablement les ressources financières du pays et le projet fut en passe d'être intégré aux projets ferrés, mais finalement il fut décidé de revenir au projet de métro initial. Trois ans après, en 1988, fut entamée sa réalisation, le marché attribué à deux entreprises nationales COSIDER et SIDER, qui n'étaient pas expérimentées en la matière, la crise financière et politique a eu un impact négatif sur le projet. Seules quatre stations seront réalisées en 15 ans ; le sous-sol d'Alger se révèle difficile à creuser, ce qui s'ajoute à une topographie irrégulière : les travaux y vont molo !
Au début des années 1990, un premier tronçon qui va de la place Emir-Abdelkader à la Grande-Poste, long de 450 mètres, est achevé. Un autre tronçon de 650 mètres, qui relie la station Grande-Poste à Khélifa-Boukhalfa est lui aussi achevé… 1999 : l'Entreprise du Métro d'Alger (EMA) lance un avis d'appel d'offres international et deux groupements sont choisis, le français SYSTRA pour la maîtrise d'œuvre et l'algéro-allemand GAAMA pour la réalisation et l'achèvement dans un délai de 38 mois des travaux de terrassement et de génie civil.
Nous sommes dans les années 2000 ; profitant du retour des équilibres économiques et la stabilité relative au sortir de la décennie noire, le gouvernement décide de doter le projet de moyens financiers adéquats et de nouvelles structures organisationnelles et opérationnelles. Ainsi, en janvier 2006, l'Entreprise du Métro d'Alger (EMA) confie la réalisation du "système intégral" (clé-en-main) au groupement constitué des entreprises françaises Siemens Transportation Systems pour la pose du matériel fixe, la signalisation et l'électrification, Vinci Construction Grands Projets et DYWIDAG International GmbH pour le génie civil, ainsi que de l'entreprise espagnole Construcciones y auxiliar de ferrocarriles (CAF) pour le matériel roulant (14 trains de 6 voitures). Le métro sera équipé du système d'automatisme Trainguard MT CBTC de Siemens. Il permettra d'assurer le déplacement des trains en sécurité et d'offrir une solution de transport attractive, c'est-à-dire rapide, ponctuelle et disponible, tout en réduisant les coûts d'exploitation et de maintenance.
Nonobstant son inauguration officielle en juillet 2009, le métro n’est pas encore fonctionnel et le chantier est toujours en cours "le retard enregistré est scandaleux" scandent les Algériens. Ils demandent des explications plausibles sur l’impotence et le silence qui entourent l'éternel chantier.

LES 5 W…

On dit qu’avec autant de retards de livraison, le métro d'Alger peut figurer dans le Guinness Book, mais franchement, c’est le dernier des soucis des Algériens, ce qu’ils veulent EUX, c’est que leur quotidien, ponctué par les embouteillages s’améliore, rencontré à la station de 1er MAI, B.FARID, un étudiant en informatique nous confie "sincèrement, je me fiche de savoir qui s’occupe du projet, ce que je sais moi, c’est que j’ai raté deux fois mon exam à cause d’embouteillages !" l’étudiant consulte sa montre, souriant, décide de m’accorder du temps, et de me donner son avis sur la polémique "je prendrais le prochain (bus, ndlr) il faut dire que désormais, j’ai le réflexe de sortir tôt de chez moi (…) c’est la malédiction ce métro, je comprends pas, normalement c’est des gens compétents qui s’en occupent non ?" lance t-il l’air incrédule avant d’enchainer "c’est la première fois que je parle un à journaliste étant aussi informé que lui sur un thème donné, El-métro tout le monde en parle… mais qu’en est-il de la presse algérienne ?" La question je l’ai reposé à des étudiants en journalisme et professionnels du métier à Alger, ils s’accordent tous à dire, que les 5 W classiques ont été et ne cessent d’être posés, les déclarations foisonnent, des contradictions relevées, des zones d’ombre éclaircies.
De son côté la presse française, s’intéresse également au dossier, du faite que c’est la RATP qui le réalise, tantôt par des news, des échos tantôt par des analyses s’articulant autour de communications de la RATP comme on peut le constater à l’occasion de la récente déclaration de Pierre Mongin, reprise aussitôt par les médias hexagonaux affirmant que la filiale RATP El Djazair "prépare activement la mise en exploitation de la 1ère ligne du métro d’Alger". La presse française, demeure indéniablement, un acteur clé du dossier.

LE TRAM CALME

Pour les Algériens, les projets du tramway et du métro d’Alger sont indissociables, d’abords parce que le tandem est tristement célèbre par les retards de livraison, constamment dans l’œil du cyclone et toujours aussi croustillants pour la presse locale qui suit de près chaque détail relatif aux deux dossiers, mais aussi parce que ces deux projets sont "perçus" comme une démarche s’inscrivant dans une stratégie globale du ministère des Transports et qui tend à désenclaver l’Algérois, et rétablir une circulation saine et fluide. Fruit d’un partenariat entre Meditrail et la firme française Alstom, le tramway d’Alger a été inauguré dimanche 7 mai, après deux ans de retard, en présence d’officiels algériens et la presse nationale, ce moyen mis à la disposition des citoyen est sensé absorber la circulation urbaine et permettre une meilleure mobilité, de quoi calmer les citoyens en grogne, dans l’attente du chimérique métro d’Alger.

Trente années après son lancement, le métro d’Alger suscite toujours une vive polémique non seulement sur les déboires qui l’entourent, mais surtout sur les zones d’ombre qu’il cache ou bien qui le cachent sous le sol d’Alger, il attire les lumières, l’incompréhension et ses questions sous-jacentes quant à l’ingrédient qui manque pour sortir cet ermite de sa longue méditation.

LE MÉTRO D’ALGER EN CHIFFRES (2)

Coût global du projet: 35 milliards de dinars.
Longueur de la ligne: 23,2 Km en double voie.
Nombre de stations: 38
Exploitation : 18h/24, 7j/7
Vitesse commerciale : 32 km/h
Vitesse maximale : 70 km/h








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