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Lavage des mains et thèse de médecine


Par Rédigé le 16/04/2020 (dernière modification le 07/04/2020)

En ces temps d’épidémie de coronavirus, on nous rappelle souvent le geste simple de se laver les mains. Cela semble naturel, pourtant il n’en a pas toujours été ainsi si l’on se réfère à la vie du docteur Semmelweis.


Le docteur hongrois Semmelweis (c) wikimedia Commons
Le docteur hongrois Semmelweis (c) wikimedia Commons
d_8_59.mp3 Dr Semmelweil  (3.18 Mo)

Ignác Fülöp (Ignace Philippe) Semmelweis est né le 1er juillet 1818 dans le quartier de Tabán à Buda, Ofen comme on disait alors en allemand. Après des études de médecine à Vienne auprès de maîtres prestigieux, il entre le 27 février 1846 au service d’obstétrique de l'Hôpital général de cette ville pour exercer les fonctions de professeur assistant. La forte mortalité qui règne chez les jeunes accouchées du pavillon où sont formés des étudiants retient très vite son attention car elle est trois fois moindre dans le pavillon voisin où sont formées les sages-femmes, ce que souligne le président de la Société Semmelweis de Vienne."Cette disparité préoccupe énormément Semmelweis, qui commence une véritable étude épidémiologique". En mars 1847, un de ses collègues meurt de septicémie après avoir effectué une autopsie, car ainsi que le précise Bernhard Küenburg "à l'époque, les étudiants en médecine passaient directement d'une autopsie à un accouchement sans se désinfecter les mains". Le docteur Semmelweis impose alors un lavage des mains avec du chlorure de chaux. Le résultat ne se fait pas attendre, le taux de mortalité diminue instantanément. Mais cela ne plaît pas à tout le monde. Si certains le soutiennent, d’autres combattent l’initiative de cet audacieux jeune médecin. Il avait compris ce qu’était la désinfection mais n’avait pu en expliquer le mécanisme. On ne renouvelle pas son contrat en 1849. Il retourne dans sa ville natale où il prend la direction de la maternité de l’hôpital Saint-Roch de 1851 à 1857.

Là encore, ses méthodes évitent à des centaines de mères les dangers de la fièvre puerpérale. Incompris, humilié. Semmelweis est l’objet de graves troubles mentaux et finalement il est interné à Döbling, actuellement le XIXe arrondissement de Vienne. Il y meurt dans des circonstances mystérieuses le 13 août 1865. Il n’avait que 47 ans. Ses obsèques ont lieu le 15 août 1865 dans l'intimité. En 1891, ses restes rejoignirent au cimetière Kerepesi de Budapest, ceux de trois de ses cinq enfants décédés en bas âge. Il faudra attendre la fin du XIXe siècle et les découvertes de Pasteur et de bien d’autres, pour qu’il soit vraiment compris et réhabilité.

Depuis le 11 octobre 1964, sa maison natale est devenue le Musée Semmelweis sur l'histoire de la médecine. La faculté de médecine de Budapest porte son nom. En 2013, l’Unesco inscrit les constatations de Semmelweis sur la fièvre puerpérale au Patrimoine mondial de l’humanité. L’écrivain et psychiatre Jean Thuillier qui lui a consacré une biographie parue le 1er janvier 1982 "Le paria du Danube" précise dans son avant-propos "Presque ignoré, souvent méprisé, persécuté pour ses idées, Semmelweis est actuellement réhabilité par les obstétriciens et accoucheurs du monde entier".

Science ou littérature?

Une thèse allait contribuer à sortir le médecin hongrois de l’oubli. Le 1er mai 1924, à la Faculté de Paris, l’étudiant en médecine Louis Destouches soutenait "Vie et œuvre de Philippe-Ignace Semmelweis (1818–1965)". Il a 30 ans, il était né le 27 mai 1894, avait été stagiaire en 1922 et 1923 dans divers hôpitaux parisiens et avait passé ses derniers examens en juin 1923. Il obtient la mention "très bien" et la médaille de bronze des prix de thèse le le 22 janvier 1925. Quelques mois plus tard sa thèse paraît à compte d’auteur "Dr. Louis Destouches, La Vie et l’œuvre de Philippe Ignace Semmelweis (1818-1865), thèse de médecine, Rennes, Francis-Simon imprimeur, décembre 1924". Elle est dédiée "à M. le professeur Follet. En témoignage de mon affectueuse admiration". Celui-ci était été membre du jury et par ailleurs était son beau-père depuis le 10 août 1919, il lui aurait dit-on, suggéré le sujet de la thèse.
Dès l'année suivante, Tibor Gyõry, historien hongrois de la médecine et éditeur des Œuvres complètes de Semmelweis avait signalé des erreurs biographiques dans le texte du docteur Destouches, sans résultat. Pour son travail ce dernier avait surtout consulté des ouvrages allemands.

Une fois diplômé, le nouveau médecin rejoignit à Genève la Section d’hygiène de la Société des Nations. Il participera à plusieurs missions organisées par la SDN, Cuba, États-Unis, Canada, puis aussi pays de la côte occidentale de l’Afrique, du Sénégal au Nigéria.
Il quitte Genève en décembre 1927 et s’installe comme médecin de ville à Clichy près de Paris.
La thèse est rééditée en décembre 1936, mais cette fois sous le nom d’écrivain de son auteur, Louis-Ferdinand Céline, qui venait alors de publier sans grand succès "Mort à crédit" mais était devenu célèbre en 1932 avec "Voyage au bout de la nuit" qui lui avait valu le prix Renaudot. Le texte, une centaine de pages, paraît chez Denoël et Steele avec un pamphlet antisoviétique "Mea culpa", écrit au retour d’un voyage en URSS qu'il avait entrepris comme de nombreux écrivains de l'époque. La thèse reparaîtra en 1952, 1966, 1977 et finalement en 1999 chez Gallimard dans la collection "L’Imaginaire" avec une préface de Philippe Sollers.








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