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Ouverture de saison de l’Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo


Par Rédigé le 25/09/2013 (dernière modification le 25/09/2013)

Quand Beethoven écrase Léo Ferré avec un Knock Out retentissant


Photo courtoisie (c) OPMC
Photo courtoisie (c) OPMC
Selon Beethoven lui-même, l’exécution de la "Neuvième Symphonie" ne devait pas dépasser les trois quarts d’heure… Gianluigi Gelmetti est plus généreux puisque son interprétation à la tête du Philharmonique de Monte-Carlo dure plus d’une heure montre en main.
Tellement rabattue, l’œuvre ne semble plus réserver la moindre surprise. Avec son finale exultant sur l'"Ode à la joie" de Schiller, cette symphonie fait partie de ces monuments culturels régulièrement convoqués pour rehausser la pompe des grands moments de l'Histoire, chute du mur de Berlin ou construction de l’Europe… Quel frisson pouvions-nous donc encore éprouver à l'écoute de cette musique rabâchée à outrance, si souvent détournée, à des fins parasitaires, de sa stricte obédience symphonique? Il ne faut donc jamais désespérer des ressources insoupçonnées d'une partition, ni de la sagacité imprévisible de certains interprètes, capables d'une approche spontanément singulière ou inventive.
La vision du chef italien, sans concession, nous a pourtant valu dimanche soir une Neuvième de tradition à la fois rigoureuse et germanique.

Dès l’introduction, très dramatique, Gelmetti s’attache à faire sonner un orchestre assez massif, sans chercher tel ou tel détail de la partition (péché mignon de tant de chefs). Les tempi sont somme toute assez rapides et le maestro italien ne craint pas les brutalités dans les contrastes. Ce caractère un peu frustre reste cependant d’une subtile sincérité par rapport au texte. Il atteint au cours du développement une remarquable tension sonore faite de rigueur et de mise en valeur assez inhabituelle de l’œuvre.
Cette rigueur toute classique a marqué également le deuxième mouvement Molto vivace malgré de très légères chutes de tension dans l’avancée pulsative. De cette confrontation austère, mais riche, l’Adagio, admirable de relief et de puissance expressive, en sort encore plus poignant par sa plénitude première, grâce à la finesse des bois (les alti!) mais aussi l’homogénéité de tous les pupitres.

Un chant rayonnant, une immense joie intérieure vous saisit tout à coup. Voilà un Beethoven fiévreux, inquiet, haletant dans une grande maîtrise des articulations dramatiques pour une œuvre multiforme, à la force théâtrale évidente.
Les choses se sont un peu gâtées dans le dernier mouvement, le chef italien se montrant par instant d’une vigueur presque trop martiale, quoique toujours remarquablement construit par un vivant dynamisme, une fougue certaine dans les épisodes vifs, dopés encore une fois par ce formidable timbalier, véritable "diabolus in musica".
Du quatuor des solistes vocaux invités, qui en vaut bien d’autres, la basse Shenyang, avec un timbre superbe, lança avec splendeur la grande évocation. Très belle réplique du ténor Christian Elsner, à la ligne de chant soignée. Les deux dames, Aga Mikolaj et Marianna Pizzolato ont des voix agréables, très stylées et pour une fois ne semblaient pas noyées dans le maelstrom musical.
Les chœurs de l’Academia Naziolale di Santa Cecilia, rompus on le sent à ce répertoire, se sont montrés d’une rare vibration, nerveux, précis, donnant après l’appel du "Seid umshlungen Millionen" une ferveur religieuse toute d’élan et de simplicité. Une jubilation interne à laquelle on peut difficilement résister.
En conclusion, un concert à l’émotion authentique et profonde. La musique dans toute son intensité et sa plénitude. Sa simplicité et son humanité.

Il n’est pas sûr par contre, que le concert hommage à Léo Ferré, une semaine auparavant, restera dans les mémoires. La symphonique inachevée (crée in loco en 1954) un rien boursoufflé voire prétentieuse de l’anarchiste monégasque a pris un sacré coup de vieux malgré quelques relents à la Kurt Weill.
Si en 1954, à la création, la surprise pouvait être de taille, soixante ans après, le magma orchestral n’accroche que par instants, telle une curiosité touristique.

Avec "La chanson du mal-aimé", sur le poème bien sûr de Guillaume Apollinaire, l’ennui s’installe souvent, le quatuor vocal naviguant entre gris clair et gris foncé.
En "mal-aimé", Laurent Deleuil ne passe pas toujours la rampe avec sa jolie voix de baryton-martin et doit laisser la place au tonitruant Jean-Luc Chaignaud, pas toujours dans la portée, mais vraie voix d’opéra faîte pour les menaces et les imprécations.
Empêtrés dans un français cosmopolite, les sopranos et le ténor italien font de jolies interventions, dans une agréable bouillie dont peu de mots sont compréhensibles.
Très drôle de voir le public, programme en main, le nez dans le livret, oublier les artistes sur scène… On a aussi connu le Chœur Hugues Reiner lui aussi plus clair de diction et de précision…

Ouverture en demi-teinte donc, salle Garnier plutôt clairsemée, ambiance mortifère sur scène et dans la salle… Ce mal-aimé risque bien de le rester longtemps…









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