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L'enfer syrien


Par Rédigé le 13/02/2018 (dernière modification le 12/02/2018)

"Si vous m’aviez dit un jour que je me retrouverai à Casablanca, loin de mon pays, de ma famille, sans emploi et pratiquement sans logement, je vous aurai ri au nez et traité de folle". Majd Assoul n’est plus de ceux dont les yeux pétillent. L’intonation de sa voix trahit un espoir qui se meure, et son visage n’exprime plus rien d’autre que de l’amertume: c'est un réfugié syrien, contre son gré.


Illustration. Image du domaine public.
Illustration. Image du domaine public.
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Majd est un commerçant de 48 ans, né et élevé à Alep, en Syrie. Marié à Limia, paysagiste, il est père de deux garçons, Mahmoud et Tareek, respectivement de 10 et 12 ans. L’enfer pour cette petite famille a commencé en 2012, lorsque la Syrie a plongé dans une guerre civile des plus sanglantes. La famille Assoul menait une vie tranquille, jusqu’à ce que la mort intervienne. "Au début, on ne se rendait compte de la réalité qu’à la télévision. Nous habitions dans une petite banlieue loin du carnage". Quelques mois sont passés pour que les explosions virtuelles se meuvent en écho, et que l’écho devienne hurlements d’horreur. "On était contraint de se cacher dans notre cave plusieurs jours durant pour se protéger, mais c’est quand une balle a frôlé mon fils Mahmoud que j’ai eu un choc. Le lendemain, nous étions dans un autocar en direction de la Jordanie".

À la frontière jordanienne, des représentants d’organismes humanitaires se trouvent sur place et escortent Majd et sa famille dans le camp Zaâtari de réfugiés, ainsi que 20 autres Syriens. "Nous étions comme du bétail entassé pêle-mêle dans des petits véhicules, fuyant un pays qu’on ne voulait pas fuir, se réfugiant dans un autre qui n’était pas le nôtre".
Dans ce camp situé à 80 km au nord-est d’Amman, les Assoul se sentent en sécurité. Bien qu’étant à l’abri du danger, les conditions de vie ne sont pas optimales. Les réfugiés dorment dans des tentes insalubres, l’accès à l’eau est limité et l’électricité défaillante. Trois mois se sont écoulés pour que Majd se rende compte qu’il n’y a pas de travail pour lui et pas d’éducation possible pour ses enfants. "J’ai alors décidé de me battre pour vivre plutôt que de nous consumer pour survivre."

Trois jours plus tard, Majd se trouve à bord d’un avion en direction d’Alger, les 3/4 de ses économies évaporées, sa famille laissée derrière. Une fois sur place, il se dirige vers la frontière maroco-algérienne à bord d’un taxi blanc de huit personnes. À son arrivée, des policiers encerclent un périmètre entaché de sacs de couchage ça et là. Ils sont une trentaine de Syriens dans ce no man’s land près de Figuig, une oasis coincée tout à l’est du Maroc, dormant à même le sol, attendant ces groupes de passeurs qui tardent à venir. "Nous serions déjà morts de faim sans les habitants de Figuig et les quelques associations locales à proximité qui risquaient gros à cause des multiples barrages de sécurité. Ils ont été admirablement solidaires." Mais le climat est rude, les tempêtes de sable et de cailloux sont fréquentes et la température peut atteindre les 50°C.

Au bout d’une semaine, des groupes de passeurs sont arrivés: "Ils m’ont demandé 5.000 dirhams pour pouvoir passer la frontière, ainsi que 4.000 dirhams pour obtenir des papiers valables uniquement pour quelques semaines". Il ne lui restera plus qu’une modique somme en poche. Majd et cinq autres compagnons ont ainsi franchi la frontière et laissé pour compte, avec pour consigne de se rendre à Rabat, à 800 km du lieu où ils se trouvent pour s’enregistrer auprès du HCR et effectuer une demande d’asile. Le trajet est laborieux: autostop, taxis à ras bord, pas de nourriture, boire à même les rivières…

À Rabat, Majd rempli un formulaire d’enregistrement et passe un entretien: "Ils m’ont dit que cela pouvait prendre quatre mois afin d’obtenir une attestation de demande d’asile, mais ça fait un an que je suis au Maroc et que je n’ai pas de nouvelles! C’est inadmissible"; Entretemps, Majd ne bénéficie d’aucune protection, ne parle ni le français, ni l’arabe marocain. Il réussit néanmoins à se procurer une cage d’escalier à Oulfa, un quartier populaire de Casablanca, grâce à ses incessantes demandes aux portes d’associations humanitaires. Aujourd’hui, il passe ses journées à la rue, tantôt en tant que vendeur ambulant, tantôt en faisant la manche. "Les Marocains sont très hospitaliers et chaleureux, mais c’est un pays où il y a beaucoup de misère et même pas de travail pour eux". Ce n’est pas encore gagné pour Majd, celui qui souhaitait bénéficier d’un regroupement familial et qui n’arrive même pas à régulariser sa situation.

S’il a pour but de protéger sa famille, il n’a en réalité qu’un seul rêve: retrouver sa famille dans son pays en paix.










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