Wanderlust Ice & Ink - Edito: Vivre deux vies à la fois, patineuse artistique professionnelle et journaliste lifestyle

Que se passe-t-il lorsque l’on choisit de suivre non pas une seule passion, mais plusieurs ? La rencontre de parcours différents peut-elle donner naissance à quelque chose de plus grand que la simple somme de ses parties ? L’histoire semble l’affirmer. Le croisement des disciplines a souvent été le terreau de la créativité, de l’innovation et de l’épanouissement. L’idée selon laquelle les passions devraient exister de manière isolée paraît aujourd’hui dépassée ; au contraire, elles peuvent se compléter, se nourrir mutuellement et créer une synergie qui élève chacune d’elles. Qu’il s’agisse d’un artiste puisant son inspiration dans le voyage ou d’un scientifique trouvant un écho créatif dans la musique, embrasser plusieurs rêves mène souvent à des découvertes et à une évolution inattendues. Léonard de Vinci en est un exemple emblématique : à la fois peintre, inventeur, ingénieur et scientifique, il a su fusionner l’art et la science pour donner naissance à certaines des œuvres les plus novatrices et intemporelles de l’histoire. Il ne s’agissait pas d’une contradiction, mais bien de l’intersection de ses multiples passions, qui a rendu ses contributions révolutionnaires. De la même manière, Charles Dickens a largement dépassé les frontières du roman. Auteur de chefs-d’œuvre tels que Un conte de deux villes ou Les Grandes Espérances, il fut également journaliste, critique social et philanthrope. Son expérience des tribunaux et son engagement auprès des populations les plus démunies ont profondément nourri son écriture. En mêlant ses différents vécus, il a façonné certains des récits les plus puissants et engagés de l’histoire littéraire, démontrant que la littérature peut être à la fois un art et un moteur de changement social. On peut aussi citer Marie Curie, dont l’excellence scientifique s’est accompagnée d’un impact social majeur, ou Frida Kahlo, qui a transformé sa douleur intime en une œuvre iconique ayant marqué durablement l’imaginaire collectif. Misty Copeland a redéfini le ballet classique en y insufflant diversité et modernité, tandis que Maya Angelou a mis la pluralité de ses talents au service de l’émancipation. Des exploratrices comme Isabella Bird aux écrivaines contemporaines comme Elizabeth Gilbert, ces parcours illustrent tous comment différentes passions peuvent converger pour créer quelque chose de plus vaste, de plus fort. Connexions et intersections : explorer plusieurs passions Et si poursuivre plusieurs passions ne signifiait pas se disperser, mais apprendre à gérer son temps afin de faire dialoguer des intérêts différents de manière cohérente ? Explorer des voies diverses peut mener à des connexions et à des opportunités que l’on n’aurait jamais anticipées. Lorsque j’ai posé les pieds sur la glace pour la première fois, enfant, le patinage m’a semblé instinctif. Il n’avait pas besoin d’être expliqué : c’était simplement l’endroit où je me sentais à ma place. Plus tard, l’écriture est devenue un autre moyen d’expression, une façon de réfléchir et de partager mes expériences. Être à la fois journaliste et patineuse artistique professionnelle peut paraître, pour certains, une association inhabituelle — créative ou sportive, interprète ou conteuse. Trouver l’équilibre entre ces deux mondes n’a pas été simple. Cela a exigé organisation, priorisation et flexibilité. Au fond, ce parcours repose sur un équilibre entre soutien extérieur et motivation intérieure. Si l’appui des proches et l’accès aux ressources sont essentiels, il appartient à chacun de transformer ces opportunités en quelque chose de concret et de significatif. La passion seule ne suffit pas : elle doit s’accompagner d’un travail intelligent, de concentration et de persévérance pour reconnaître son potentiel et lui donner forme. J’ai appris que les chemins ne sont pas cloisonnés, mais complémentaires. La scène, par exemple, fait naître des idées d’écriture, tandis que l’écriture m’offre de nouvelles perspectives sur le patinage. L’un aiguise l’autre. Une gestion efficace du temps s’est révélée essentielle, car les deux exigent discipline, créativité et constance, comme tout projet exigeant. Les défis sont bien réels, mais les récompenses le sont tout autant. Bien que le patinage, l’écriture et le voyage puissent sembler sans rapport, ils sont en réalité profondément et indéniablement liés. Voyager dans plus de vingt-neuf pays, me produire en direct et travailler comme journaliste ont façonné ma vision du monde et ma manière d’aborder mon travail. Au fil de ces expériences, j’ai rencontré des personnes aux histoires et aux ambitions remarquables, qui m’ont durablement marquée. Se produire sur scène me donne l’énergie de donner le meilleur de moi-même à chaque instant, tandis que l’écriture m’offre la distance nécessaire pour réfléchir et transformer ces moments en récits porteurs de sens. Au cours de ces années, j’ai aussi pris conscience du poids des responsabilités que beaucoup portent, jonglant entre travail, famille ou construisant leur vie dans des contextes où les opportunités sont plus rares. Le voyage m’a rappelé sans cesse le privilège que représente ma trajectoire, ainsi que la résilience de celles et ceux qui évoluent dans des conditions bien plus complexes que les miennes. Mes défis font partie intégrante de la vie que j’ai choisie, et je suis reconnaissante des leçons et des opportunités rencontrées en chemin. Dans cet article, j’explore le lien singulier entre le spectacle vivant et le récit, entre le voyage et la créativité, à travers des moments clés qui ont façonné mon parcours. Ces réflexions montrent comment des chemins apparemment éloignés peuvent s’entrelacer pour donner naissance à quelque chose d’inattendu, et comment écouter son intuition, tout en s’investissant pleinement, peut conduire à une harmonie surprenante entre des mondes que l’on pensait opposés. À travers cinq réflexions clés, je partage ce que j’ai appris en transformant une passion d’enfance pour le patinage en carrière, en relevant des défis tels que devenir acrobate aérienne sur glace, et en découvrant que le journalisme est devenu un autre langage pour m’exprimer. J’y évoque également la manière dont le voyage a élargi mon regard, enrichissant à la fois ma pratique du patinage et mon écriture. Être entourée de personnes bienveillantes et immergée dans des cultures différentes m’a appris combien nous avons à apprendre les uns des autres. Que vous soyez curieux des coulisses du monde artistique, du processus créatif de l’écriture, ou en quête d’inspiration pour concilier plusieurs centres d’intérêt, ce texte propose des pistes pour trouver l’harmonie dans une vie aux multiples facettes.

J’ai commencé le patinage à l’âge de quatre ans, car je souffrais de crises d’asthme sévères, et l’environnement frais de la patinoire m’avait été recommandé pour m’aider à mieux respirer. Ce qui n’était au départ qu’une décision pratique est rapidement devenu une véritable passion. En grandissant à Saint-Nazaire, une ville connue pour ses chantiers navals, je ne me demandais pas où le patinage pourrait me mener : il s’est simplement imposé comme une évidence, faisant partie intégrante de ma vie. À six ans, je participais déjà à des compétitions, et le patinage est devenu mon centre d’attention. Issue d’un milieu modeste, j’ai très tôt compris que le travail et la concentration étaient essentiels, car rien n’est jamais acquis ni garanti. Cet état d’esprit a façonné la manière dont j’aborde chaque opportunité. J’ai grandi portée par le travail acharné, la détermination, l’humilité et l’amour de ce sport. Formée au sein du programme sport-études en France jusqu’à l’obtention de mon diplôme universitaire, j’ai dû apprendre à concilier scolarité et entraînement intensif, une exigence constante de discipline et d’engagement. Mes journées commençaient à cinq ou six heures du matin par l’entraînement, se poursuivaient par une journée complète de cours, puis reprenaient sur la glace en soirée. Les devoirs et les révisions s’étiraient tard dans la nuit. Certains jours semblaient écrasants, et il arrivait que la fatigue brouille ma concentration. Pourtant, je n’ai jamais remis en question mon amour pour le patinage ni mon désir d’en faire mon métier. Les études représentaient un plan B, un filet de sécurité au cas où les choses ne se dérouleraient pas comme prévu, mais mon cœur, lui, était toujours sur la glace. Savoir que chaque réveil à l’aube et chaque journée interminable me rapprochaient de mon rêve me donnait la force d’avancer. Cela m’a appris que vivre de sa passion ne relève pas du hasard : c’est une question de constance, de présence au quotidien, de concentration et de travail.

En grandissant, mon parcours a pris une nouvelle direction lorsque j’ai choisi de me spécialiser en patinage en couple. Enfant, j’admirais la beauté de cette discipline lors des stages d’été. Les portés complexes et la coordination parfaite me fascinaient, et il m’a semblé naturel de m’y consacrer. J’ai toujours été attirée par l’acrobatie, le frisson des sauts, des pirouettes et des envolées, la confiance absolue, la synchronisation et la connexion forte avec un partenaire. Ce qui rendait le patinage en couple si particulier à mes yeux, c’était la sensation qu’il procurait : comme des montagnes russes, un mélange d’adrénaline et de liberté qui ajoutait une nouvelle dimension au patinage. J’ai appris de nouvelles techniques, et la confiance ainsi que la compréhension mutuelle se sont développées naturellement à travers la pratique partagée, souvent sans avoir besoin de mots. Cette expérience m’a appris qu’une véritable connexion sur la glace dépasse le langage ; partager le même amour pour une passion commune suffit à créer un lien profond. En 2014, mon parcours a de nouveau évolué lorsque je suis passée de la compétition au patinage de spectacle. En quittant l’univers structuré des systèmes de notation, j’ai pleinement embrassé l’art et la narration de la performance. Le patinage de spectacle m’a permis de créer une relation différente avec le public, transformant les chorégraphies en véritables expressions créatives. Se produire dans des spectacles sur glace impliquait de nouvelles exigences : enchaîner plusieurs représentations par semaine demandait une grande endurance physique, et jouer en direct nécessitait une concentration constante. Mais cela m’a aussi apporté une immense joie — les applaudissements du public, l’émotion de patiner dans des lieux exceptionnels, et la camaraderie née du travail au sein d’une troupe de patineurs et d’artistes talentueux venus du monde entier. Au fil des années, je me suis produite dans des arénas et des théâtres à travers 29 pays. Partir en tournée avec des compagnies de patinage avait parfois quelque chose de surréaliste, notamment lorsque je patinais dans des salles ayant autrefois accueilli des matchs de NBA ou de NHL. Cette année, j’ai franchi une nouvelle étape en me produisant sur un bateau de croisière. Travailler aux côtés d’artistes, de musiciens et de membres d’équipage issus de cultures diverses m’a rappelé combien la collaboration permet de réunir des talents variés pour créer quelque chose de profondément significatif. C’est également au fil de ce parcours que j’ai rencontré mon fiancé, qui exerce le même métier que moi. Voyager et vivre ensemble toutes ces expériences sur la glace a rendu cette aventure encore plus riche. Partager les défis, les réussites et la joie de la scène avec quelqu’un qui comprend si intimement cette réalité a ajouté une dimension supplémentaire à cette vie sur la glace. Le patinage a façonné bien plus que ma carrière : il a forgé mon caractère. Il m’a appris la persévérance, l’adaptabilité et la capacité à me relever plus forte après chaque chute. Ce qui a commencé comme une passion d’enfance est devenu un véritable cheminement de croissance, d’expression et de résilience. Chaque faux pas, chaque moment de bonheur sur et hors de la glace, chaque rencontre et chaque défi ont contribué à faire de moi la personne que je suis aujourd’hui, à la fois en tant qu’artiste et en tant qu’individu.

La pandémie de COVID-19 a bouleversé le monde entier, et le secteur des arts de la scène n’a pas fait exception. Avec la fermeture prolongée des patinoires, des théâtres et des centres d’entraînement, les artistes comme moi ont dû faire preuve de créativité pour continuer à faire vivre leur passion. Pour ma part, cette période est devenue un tournant inattendu, m’ouvrant les portes du patinage aérien : une discipline à la croisée du mouvement sur glace et de la grâce aérienne. Le cerceau aérien sur glace porte bien son nom. Il s’agit d’une fusion entre le patinage artistique et l’acrobatie aérienne, réalisée à l’aide d’un cerceau suspendu, appelé lyra. Imaginez l’élégance et la précision du patinage, enrichies par une sensation de vol. Les artistes utilisent le cerceau pour exécuter des pirouettes, des poses et des transitions, passant avec fluidité de la glace aux airs. C’est une discipline visuellement saisissante, qui exige à la fois la maîtrise technique d’un patineur et la force, le contrôle et la sensibilité artistique d’un acrobate aérien. Confrontée à l’impossibilité de m’entraîner, mon fiancé m’a fait une surprise inoubliable : un agrès aérien conçu sur mesure et installé dans le jardin de sa maison. Cet espace est devenu mon refuge durant le confinement, me permettant de poursuivre mon entraînement sous la direction de deux entraîneurs de cirque exceptionnels. Grâce aux visioconférences, j’ai commencé à travailler à la fois le tissu aérien et le cerceau, m’entraînant avec eux au moins deux fois par semaine, tout en pratiquant quotidiennement de mon côté. Alors que le monde semblait à l’arrêt, ces séances sont devenues un moyen de rester connectée à mon art et d’explorer de nouvelles dimensions de la performance. À la fin du confinement, j’ai pu transférer ce travail sur la patinoire où je m’entraîne actuellement. J’ai alors eu la chance de donner vie à ce projet en créant et en perfectionnant plusieurs numéros de cerceau aérien sur glace. Cette étape a été déterminante dans la fusion de la fluidité du patinage et des sensations propres aux arts aériens, donnant naissance à des routines à la fois uniques et transformatrices. Cet engagement m’a permis, dans les années suivantes, de décrocher deux contrats majeurs en Allemagne, marquant officiellement le début de ma carrière d’acrobate aérienne sur glace. Se produire à l’international au sein de distributions professionnelles a été l’aboutissement d’un rêve, un jalon important ouvrant un nouveau chapitre de ma trajectoire artistique, où deux formes d’art se sont mêlées pour repousser les limites de la performance. Tout au long de ce parcours, j’ai eu la chance d’être entourée de personnes présentes à chaque étape. Qu’il s’agisse de m’aider à filmer, enregistrer, photographier, réfléchir à de nouvelles idées de numéros ou simplement de veiller à ce que je puisse répéter sur la glace, leur soutien a été essentiel. Savoir que des proches croient en ma vision et participent activement à sa concrétisation rend chaque jour de ce chemin encore plus précieux. Je sais avec certitude que je n’aurais pas pu accomplir tout cela seule. Avec le recul, ce qui avait commencé comme une solution face à une crise mondiale s’est révélé être un moment fondateur dans l’évolution de ma carrière. Le patinage aérien m’a offert une nouvelle manière de m’exprimer, renouvelant mon regard artistique et approfondissant ma sensibilité. Au fil de cette aventure, j’ai pleinement pris conscience que bénéficier du soutien de ses proches, de ressources et d’opportunités est un privilège, et j’en suis profondément reconnaissante. J’ai également appris l’importance de l’humilité. Même si le public n’en perçoit pas toujours les risques, il s’agit d’une discipline exigeante et potentiellement dangereuse, qui demande une préparation constante et une attention de chaque instant. Si les personnes et les moyens qui m’ont entourée ont joué un rôle fondamental, c’est aussi la détermination, la créativité et l’engagement sans relâche dans mon développement qui ont transformé ces opportunités en accomplissements durables. Le véritable progrès naît d’un équilibre subtil entre soutien, préparation et volonté d’aller plus loin.

On admire souvent le résultat final : les réussites, la reconnaissance, l’aboutissement soigné d’un travail. Mais on voit rarement les efforts en coulisses — les réveils à l’aube, les nuits tardives, et le dévouement sans relâche nécessaires pour exceller dans n’importe quel domaine, qu’il s’agisse du sport, des arts, de l’entrepreneuriat ou de la vie quotidienne. Il est facile de s’émerveiller devant l’élégance d’une chorégraphie, les costumes scintillants, les applaudissements, les projecteurs et le glamour du spectacle vivant. Pourtant, peu de personnes mesurent les années de travail et d’engagement qui précèdent ces instants fugaces sur scène. En tant qu’interprètes, une part de la magie réside justement dans cette apparente facilité, et nous en tirons une grande fierté — car ces moments sont aussi notre bonheur. Derrière chaque routine gracieuse se cachent des heures innombrables de chutes, d’apprentissage et de perfectionnement. Ces premières années m’ont appris la résilience et la détermination, mais elles étaient indéniablement éprouvantes. Le travail repose sur une répétition constante, non pas seulement jusqu’à réussir, mais jusqu’à ce que l’erreur devienne presque impossible. Il y a eu d’innombrables journées où je suis tombée plus souvent que je n’ai réussi, mais chaque chute était une leçon, chaque faux pas une occasion de progresser. Ce principe ne s’applique pas uniquement au patinage. Michael Jordan, considéré comme l’un des plus grands joueurs de basketball de tous les temps, l’exprimait parfaitement : « J’ai raté plus de 9 000 tirs dans ma carrière. J’ai perdu près de 300 matchs. On m’a fait confiance 26 fois pour prendre le tir de la victoire, et je l’ai manqué. J’ai échoué encore et encore dans ma vie. Et c’est pour cela que je réussis. » Son succès ne reposait pas uniquement sur le talent, mais sur une quête incessante de perfection et le courage de persévérer malgré l’échec. On a aussi tendance à attribuer la réussite à la “chance”, comme si elle tombait du ciel sans effort. En réalité, le succès est rarement une question de hasard ; il est le fruit d’un travail acharné et réfléchi. Il ne s’agit pas seulement de fournir des efforts, mais de fournir les bons efforts, en se concentrant sur ce qui compte réellement. Enfant, cependant, on ne saisit pas immédiatement cette notion. À l’époque, tout se résumait aux heures passées sur la glace, à l’épuisement et à l’application stricte des consignes. L’idée de travailler plus intelligemment, et pas uniquement plus dur, vient plus tard — avec l’expérience, les conseils et le recul. Pablo Picasso l’a résumé avec justesse : « L’inspiration existe, mais elle doit vous trouver en train de travailler. » Que l’on soit artiste, athlète ou entrepreneur, le véritable progrès naît d’un effort constant allié à une intention claire. Avec le temps, j’ai compris que la réussite ne consiste pas à s’acharner sans relâche, mais à travailler avec discernement, à savoir prioriser et à trouver un équilibre. L’une des plus grandes leçons que j’ai apprises est que le processus compte autant que le résultat. Des écrivains comme Ernest Hemingway ont réécrit leurs textes d’innombrables fois avant de donner naissance aux œuvres que nous admirons aujourd’hui. Le patinage, comme l’écriture ou toute autre démarche créative, repose sur un travail de précision répété jusqu’à ce que chaque détail paraisse juste, fluide et percutant. Se produire en direct m’a également appris à accepter l’imperfection. Peu importe le niveau de préparation, l’imprévu peut toujours survenir : une glissade, un pas manqué, un problème technique. Ce qui nous définit n’est pas la perfection, mais notre capacité à nous adapter et à continuer. Comme l’écrivait Leonard Cohen : « Il y a une fissure en toute chose, c’est ainsi que la lumière entre. » Ces enseignements dépassent largement le cadre du patinage. Toute carrière, tout rêve, repose sur le travail, la résilience et la capacité à apprendre de ses échecs. Que l’on crée une entreprise, que l’on poursuive une passion artistique ou que l’on cherche simplement à progresser dans son domaine, les principes restent les mêmes. Le succès se construit pas à pas, à travers de petites victoires, des revers, et cet effort discret et constant que personne ne voit.

En 2018, j’ai ouvert un nouveau chapitre de ma vie, apportant une dimension différente à mon parcours d’artiste : le journalisme. J’ai toujours aimé écrire. C’était pour moi une manière de prendre du recul, de réfléchir et de raconter des histoires. Après l’obtention de ma double licence en management du sport et en droit-économie, m’orienter vers le journalisme s’est imposé comme une évidence. Je souhaitais m’engager dans une voie qui me passionne réellement ; j’ai donc intégré le programme de master de l’École supérieure de journalisme de Paris. C’est à ce moment-là que j’ai commencé à collaborer avec l’International Podcast Journal, en écrivant sur des sujets qui me tenaient à cœur et en trouvant peu à peu ma voix de journaliste. Grâce au soutien de ma rédactrice en chef, j’ai pu poursuivre cette collaboration tout en bénéficiant d’une véritable liberté créative, notamment en développant ma propre chronique. Au sein du Podcast Journal, j’ai abordé des thématiques variées, allant de l’art et du voyage à la mode et au lifestyle. J’ai alors compris que la mode ne se résumait pas aux vêtements, mais qu’elle constituait un langage, une manière pour chacun d’exprimer son identité et d’interagir avec le monde qui l’entoure. Le journalisme lifestyle ne se limitait pas à l’esthétique : il s’agissait de révéler les histoires derrière ce que l’on voit, et d’explorer la manière dont les individus créent, vivent et se racontent. Lors des Fashion Weeks, j’ai eu le privilège de rencontrer des créateurs et des maisons de relations publiques remarquables, avec lesquels je suis, pour beaucoup, encore en contact aujourd’hui. Leurs conseils et leur collaboration ont joué un rôle essentiel dans mon évolution en tant que journaliste de mode. Trouver l’équilibre entre l’écriture et la scène n’a pas toujours été simple, mais cette dualité s’est révélée profondément enrichissante. La performance exige une énergie immédiate et une présence totale à l’instant, tandis que l’écriture m’offre le recul nécessaire pour analyser et assimiler ce que je vis. L’une nourrit l’autre. Depuis mes débuts, le journalisme m’a menée vers des horizons inattendus. J’ai assisté à des événements de mode, rencontré des personnalités inspirantes et écrit sur des sujets qui me touchent sincèrement. Ces expériences ont transformé mon regard sur le monde et m’ont amenée à envisager la narration de manière plus large. En retour, elles m’ont offert de nouvelles idées à réinvestir sur la glace. L’écriture est une autre façon de faire ce que j’aime profondément : créer des liens, transmettre des émotions et explorer des idées. Elle ne s’oppose pas au patinage, elle l’accompagne. Dans les deux cas, il s’agit de raconter quelque chose de juste et de significatif, que ce soit par le mouvement ou par les mots.

Au cours de la dernière décennie, le patinage m’a menée dans 29 pays, à travers cinq continents. Il est difficile de mettre des mots sur ce que représente le fait de se produire dans autant de lieux différents. Chaque pays possède sa propre énergie, sa manière singulière de percevoir l’art et d’y répondre, et cela influence inévitablement la façon dont on aborde la scène. Des arénas d’Asie aux théâtres d’Europe, et aujourd’hui aux scènes installées en mer sur des bateaux de croisière, chaque environnement m’a appris quelque chose sur la relation au public et sur l’adaptation aux cultures. Voyager autant m’a ouvert à des perspectives que je n’aurais jamais connues autrement. Il ne s’agit pas seulement des destinations, mais surtout des personnes rencontrées, des échanges partagés et de la manière dont ces expériences ont façonné mon regard sur le monde. Me produire dans différentes régions du globe m’a montré combien l’art dépasse les barrières linguistiques et culturelles, et comment le patinage, tout comme l’écriture, constitue une autre façon de créer du lien. Être constamment en mouvement apprend aussi la flexibilité. Aucun contrat ne ressemble au précédent : nouvelles distributions, nouveaux environnements, nouveaux défis. Mais c’est précisément ce qui rend cette vie si riche. Chaque nouvel endroit oblige à s’adapter, à évoluer et à apporter quelque chose de différent. Ces enseignements ont également nourri mon écriture. Le voyage m’a offert des histoires à raconter, ainsi qu’une profondeur et une précision nouvelles à insuffler dans mes textes.

Le patinage, l’écriture et le travail aérien peuvent sembler être des aspects distincts de ma vie, mais pour moi, ils sont profondément liés. Chacun nourrit l’autre. Le patinage m’enseigne l’art de la performance, de l’adaptation et du récit sans mots. L’écriture m’offre l’espace du recul, transformant ces histoires vécues en quelque chose de tangible. Le travail aérien, quant à lui, repousse les limites, ouvrant de nouveaux territoires à la créativité comme au mouvement. Avec le temps, j’ai compris que ces passions ne coexistent pas séparément ; elles s’entrelacent et façonnent ma manière de créer, d’aborder les défis et d’interagir avec le monde. Voyager, se produire sur scène et écrire m’ont appris qu’il n’existe pas de chemin unique. L’essentiel réside dans la capacité à identifier les points de rencontre entre différentes voies et à laisser ces intersections ouvrir de nouvelles perspectives et opportunités. La vie n’est pas faite pour suivre une trajectoire unique et linéaire. Nos passions, nos compétences et nos expériences se croisent souvent de manière imperceptible au premier regard, mais leur combinaison donne naissance à quelque chose de plus fort. Il ne s’agit pas de compartimenter ou de restreindre, mais de permettre à ces différentes couches de s’enrichir mutuellement et d’observer ce qui en émerge. À travers ma chronique Wanderlust Ice and Ink (Glace et Encre), je poursuis cette exploration des points de convergence, en partageant des récits qui témoignent de la richesse née du mélange des passions et des regards. Que ce soit par l’art, le mouvement ou le récit, il reste toujours quelque chose à découvrir, toujours des façons de relier des mondes que l’on croyait séparés. Sur la glace comme plume à la main, j’ai trouvé du sens dans le processus, dans l’adaptation au changement et dans l’élan vers ce qui vient ensuite.