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Locavores et fiers de l’être: La Ruche qui dit Oui fait son buzz

Vie associative


Par Rédigé le 05/01/2016 (dernière modification le 05/01/2016)

Et si on consommait local? Et si on zappait la grande distribution? Et si on achetait un panier avec juste ce qu’il nous faut, quand on veut, sur internet et sans faire d’appoint? Depuis 2011, une AMAP 2.0 déploie ses ailes sur le terroir. Enquête sur un phénomène qui n'en reste pas moins commercial.


Samedi matin devant l'épicerie Da Rosa: la Ruche bourdonne de locavores. Photo © Guillaume
Samedi matin devant l'épicerie Da Rosa: la Ruche bourdonne de locavores. Photo © Guillaume
la_ruche_qui_dit_oui.mp3 Initiative de consommation citoyenne en France.mp3  (2.73 Mo)

Un marché de fortune se tient entre une haie de sapinettes sur le trottoir d’un petit espace animé à Saint-Germain des Prés. On dirait une vente de gâteaux scouts. Les abeilles de La Ruche qui dit Oui s’affairent à distribuer des prospectus aux passants surpris autant par l'ambiance que par les victuailles. "Est-ce que je peux acheter quelque chose, là, maintenant?" demande un curieux devant du pain de campagne dont le blé vient de la Beauce. "Non, on n'encaisse rien, il faut passer par le site. Tenez, c’est une fois par semaine chaque samedi matin." Même si le site internet prend une commission, les bénévoles soutiennent une autre façon de consommer: ici ce n’est pas forcément du bio, mais du local.


Tout vient à moins de 250 km de Paris.
Tout vient à moins de 250 km de Paris.
Tout est ramassé, cueilli, pêché, coupé à moins de 250 km de Paris: salades, pommes, viandes, coquillages, soupes... C'est l'objectif de la Ruche: "développer les circuits courts pour retrouver le goût des terroirs, lutter contre le changement climatique et reconnecter consommateurs et producteurs". En pratique, 250 km, ça fait beaucoup! D'autant que le grossiste d'un terroir éloigné (par exemple, le Bordelais) présent dans cette zone peut prétendre vendre ses produits sur Paris.

Chaque producteur s'organise pour apporter à la Ruche ce qu'il faut; souvent le transport est mutualisé et les retards sont rarissimes. Sur ces étales, on ne trouve pas d’oranges. "Qui sait, avec le réchauffement climatique, peut-être qu’un jour on en trouvera" sourit un des six bénévoles. Les prix sont peu ou prou ceux du quartier même si "les produits préparés sont un peu chers" prévient Céline, trentenaire convertie par sa collègue de travail et ancienne adepte des AMAP, ces associations pour le maintien d'une agriculture paysanne en France. Les AMAP délivrent chaque semaine un panier de légumes de saison payé au trimestre. Mais les paniers sont standardisés. Il faut les chercher chaque semaine et c’était trop pour Céline.

La Ruche qui dit Oui est une sorte de mise à jour commerciale du concept d’AMAP. La version 2.0 efface ces défauts mais tend à fragiliser un peu plus le producteur qui est dépendant de sa clientèle. La grosse différence réside dans le fait que la Ruche est un intermédiaire qui perçoit une commission sur les ventes là où l'AMAP reste entièrement bénévole et associative... ce n'est donc pas du tout le même type de fonctionnement: on pourrait même parler d'un circuit "classique" dans une forme complètement délocalisée et dématérialisée.

Corinne, la chef de Ruche, ici assise, découvre l'engagement associatif et reçoit une rémunération de 8% des ventes pour son travail. Photo © Guillaume
Corinne, la chef de Ruche, ici assise, découvre l'engagement associatif et reçoit une rémunération de 8% des ventes pour son travail. Photo © Guillaume
interview_corinne_jacobson.mp3 Interview de la chef de Ruche Corinne Jacobson.mp3  (4.31 Mo)

Corinne trône en reine-mère au milieu de la jeune Ruche. Sa structure existe depuis 2014 pour 80 clients. Elle gère les commandes, les plaintes des consommateurs... bref: elle anime l’antenne du 6e arrondissement en contactant les producteurs et en envoyant des courriels aux abeilles (voir ci-contre). Cette quinquagénaire qui œuvre dans la mode n’est pas bénévole: son travail est rémunéré pour une somme qu’elle considère symbolique et ne souhaite pas dévoiler. Les reines sont un maillon essentiel de la stratégie commerciale: 8,35% du chiffre d'affaire HT revient au gérant du site et un pourcentage similaire revient à l'organisatrice de la Ruche. Une juste rétribution pour un investissement important. "Le gain net pour 10 à 15 heures de travail hebdomadaire est de 6,28€ de l’heure, inférieur au SMIC" souligne un article de Netoyen.info. Avec 17% de marge, on est loin des 30% de la grande distribution mais la démarche "est clairement spéculative" prévient par courriel un pratiquant de longue date dans les Yvelines qui craint la perspective d'une vente de la structure avec une plus-value importante.

Axelle, la vingtaine, débarque pour la première fois séduite par le bouche à oreille. Prudente, elle questionne tout d’abord Corinne pour savoir si la chaîne du froid est bien respectée. "En 4 ans, il n’y a pas eu une seule intoxication sur toute la France." La chef de Ruche rassure et sort son carnet "Vous avez quel numéro? 32? Prenez vos affaires et quand vous avez fini venez me voir". Quand je demande pourquoi elle ne passe pas par un magasin bio, Axelle répond que c’est "cher et un peu surfait". Elle cherche de la convivialité et des produits frais.

"Je crois que je n’ai pas eu beaucoup de succès, je ne repars qu’avec mes œufs de caille!" annonce Axelle dépitée par sa première commande. "Apparemment il y a eu un problème avec Chronopost qui n'a pas livré à temps. On a fait un essai qui n'a pas marché. C'est exceptionnel. Elle sera remboursée" regrette Corinne.

Au niveau écologique, ce qui est intéressant c'est qu'il n'y a pas de surplus. Tout est consommé. "C'est le but de la Ruche: commander ce qu'on veut" s’enthousiasme la jeune Marilia. Elle veut même ouvrir sa propre Ruche dans son arrondissement... là où il y a en déjà cinq. Quant aux maraîchers et poissonniers du quartier, ils ne connaissent pas la crise et ne voient pas de concurrence dans cette démarche qu'ils considèrent encore comme très marginale.

La Ruche qui dit Oui ne semble pas s'arrêter d'essaimer sur nos terroirs: d'une équipe de cinq salariés pour 24 Ruches fin 2011, la société mère emploie près de 80 personnes pour 700 Ruches en 2015. Grâce à cette démarche commerciale d'un genre nouveau, reines et abeilles ouvrières ne connaissent pas la crise des pesticides.

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